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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/432

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lorsque le germe est assez grand, on met la racine dans un four modérément chaud, afin de dessécher le germe, & le grain ne paroît plus, parce qu’il est recouvert par le resserrement de la racine. Notre but en donnant ces détails est uniquement de détruire une erreur fort accréditée dans les campagnes, & de fournir le moyen de démasquer la charlatanerie lorsque l’occasion s’en présente. Ces mêmes botteleurs font encore voit de prétendus basilics, avec des yeux bleus, & dont le seul regard tue l’homme, si le basilic le voit le premier. C’est avec une jeune raye, (poisson de mer,) qu’on fabrique ce monstre fabuleux.


MANIE. Médecine Rurale. On appelle de ce nom un délire perpétuel, sans fièvre, avec fureur & audace.

Cette maladie a toujours quelque symptôme précurseur. Pour l’ordinaire, ceux qui en sont menacés éprouvent de fréquens maux de tête, sont agités par des veilles presque continuelles ; leur sommeil est entrecoupé par des songes fatiguans, qui les jettent dans un état violent de souffrance ; ils se sentent plus lourds & plus affaissés immédiatement après leurs repas ; la digestion chez eux est pénible & laborieuse ; ils rendent beaucoup de vents par la bouche ; leurs hippochondres sont comme tuméfiés ; de plus, ils sont rêveurs, pensifs, & naturellement inquiets ; ils se dégoûtent facilement de ce qu’ils recherchoient avec avidité ; le souci, la tristesse, & la peur s’emparent de leur ame, & bientôt après leurs yeux sont frappés & éblouis par des traits de lumière, des espèces d’éclairs ; c’est alors que leur regard est audacieux, leurs yeux enflammés, le visage pâle, & qu’ils sont toujours prêts à faire du mal aux autres ; ils éprouvent un bourdonnement & un tintement d’oreilles ; ils sont insensibles à la faim, aux froids les plus aigus, & aux veilles continuelles ; ils sont d’une chaleur & d’une force si grande, qu’ils brisent tout ce qui les environne, & se débarrasseroient de l’homme le plus fort & le plus vigoureux. Dans cet état ils aiment les femmes avec fureur ; ils désirent ardemment le coït ; les pollutions nocturnes sont fréquentes ; ils s’emportent contre les assistans, déchirent leurs habits, & se découvrent indécemment tout le corps : quelquefois ils fixent les yeux sur un objet, & ce n’est que très-difficilement qu’on parvient à en détourner leurs regards. Quelquefois aussi ils rient, contre leur coutume, ils parlent beaucoup à tort & à travers. Il y en a qui ne cessent de chanter, de parler, de rire ou de pleurer. Ils changent de propos à chaque instant ; ils oublient ce qu’ils viennent de dire, & le répètent sans cesse.

Tantôt le délire est continuel, & tantôt périodique. Les malades semblent, pendant quelque temps, jouir de leur raison : ils étonnent, par leur sagesse, ceux qui les traitent de fous ; mais au bout de quelques heures, de quelques jours, & même de quelques mois, ils retombent dans leur manie.

Les hommes vifs, ardens & colériques, & dont la sensibilité est extrême, soin les plus sujets à la manie. J’ai observé que ceux qui y étoient disposés, avoient les yeux faïencés : je puis même assurer que ce symptôme ne m’a jamais trompé, &