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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/576

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successivement, à-peu-près comme une vessie remplie d’eau qu’on presseroit entre les mains, tantôt d’un côté, tantôt d’un autre. La liqueur pressée par-tout, cherche une issue pour s’échapper, l’abeille, en ouvrant la bouche, lui laisse un passage libre, & elle sort.


Section III.

Comment le miel est-il contenu dans les alvéoles ou cellules ?


Il paroît difficile que le miel encore assez liquide au sortir de l’estomac de l’abeille, puisse être contenu & fixé dans les alvéoles, dont la position est horizontale. Lorsqu’il n’y en a encore que quelques gouttes, on conçoit bien qu’il peut y demeurer sans verser ; mais à mesure que l’alvéole s’emplit, cela pourroit arriver. Les abeilles intéressées à prévenir l’épanchement d’une liqueur qui leur donne tant de peine à ramasser, ont soin que la dernière couche soit plus épaisse : & comment y réussissent-elles ? C’est ce qui n’est point aisé à connoître. Peut-être que le miel qui a séjourné un peu plus dans leur estomac que l’autre, est mêlé avec de la cire qui lui donne assez de consistance pour servir de couvercle à l’alvéole. Quoi qu’il en soit, ce couvercle, qu’on peut comparer à la crème qui s’élève au-dessus du lait, n’a point un plan perpendiculaire à l’axe de l’alvéole, les abeilles lui font prendre une certaine courbure, jugeant cette forme de couvercle plus capable de retenir leur miel dans les magasins. Quand une abeille, qui veut se débarrasser, arrive dans un alvéole, la tête étant entrée, les pattes de ses premières jambes soulèvent cette croûte, ou ce couvercle, & alors elle dépose son miel, qui s’unit à l’autre par cette ouverture qu’elle lui a ménagée. Avant de sortir, elle a soin de rapprocher le couvercle avec ses premières pattes, & de lui donner la courbure nécessaire, afin que le miel soit retenu, & qu’il ne s’épanche pas.

Lorsque les alvéoles, qui servent de magasins pour y déposer le miel, sont remplis, l’abeille, pour enfermer l’entrée, forme tout autour un cordon de cire, qu’elle continue jusqu’à ce qu’il ne reste plus d’ouverture ; & dès qu’il est fermé, on n’y touche plus ; c’est un dépôt de provisions auquel on aura recours dans le temps que la campagne n’offrira plus aucune sorte de nourriture : il y en a d’autres qui sont toujours ouverts, & qui sont destinés pour la consommation journalière. Les abeilles, très-économes & assurées de la discrétion de toutes les citoyennes qui composent la république, ne ferment pas leurs magasins pour prévenir la dissipation que quelques-unes d’entr’elles pourroient faire du miel qui y est déposé : c’est uniquement pour empêcher une évaporation que ne manqueroit pas d’occasionner la grande chaleur de la ruche : le plus liquide du miel étant évaporé, ce qui resteroit auroit trop de consistance, & deviendroit grainé : c’est précisément ce qu’elles veulent éviter ; parce qu’alors il leur est plus difficile de s’en nourrir, & elles seroient obligées de le broyer avec les dents pour le rendre un peu liquide ; & nos ouvrières, qui ne craignent point la peine quand il faut se bâtir