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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/96

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terrasse du nord, pour voir la statue équestre de Georges Ier 62 ; elle est placée hors des jardins, quoique sur la même ligne que la terrasse & à l’extrémité d’un tapis verd 63, fort vaste & parfaitement uni, qui règne dans toute la longueur de la façade du nord ; cette statue est très-médiocre dans son genre.

À peu de distance de la statue commence une vallée, dont le bord règne parallèlement à la terrasse ; depuis ce bord jusqu’au fond de la vallée, la pente oblique est environ de sept à huit cent pieds. Le terrein, extrêmement diversifié & couvert de toutes sortes de troupeaux, tant dans la vallée que dans les campagnes qui sont au-delà, offre une perspective des plus agréables & des plus champêtres.

Faites entièrement le tour de ces belles allées qui environnent les jardins de toutes parts, excepté au levant, & terminez le petit voyage de Stowe par la superbe porte ou arcade qui est au midi des jardins, sur le bord du chemin qui conduit à Buckingham ; elle est construite dans le goût de la porte S. Martin de Paris, quoique moins vaste, & sans figures ni trophées. Cette façade est ornée de quatre belles colonnes corinthiennes ; l’intérieur de la voûte, qui est très-large, est sculpté en grands quarrés creux, & l’entablement est surmonté d’une très-belle balustrade. Cette porte de décoration répond exactement à la grande avenue des jardins, au sommet de laquelle est placé le château. On le voit tout entier s’élever au milieu des bois, ainsi que plusieurs autres bâtimens, tels que le temple gothique, la rotonde, les colonnes, &c., ce qui forme un tableau magnifique.

Tels sont les jardins de Stowe, ou vous voyez, dit Pope, l’ordre dans la variété ; où tous les objets, quoique différens, se rapportent à un seul tout : ouvrage admirable de l’art & de la nature, que le temps perfectionnera.

On auroit tort de se figurer que ces temples, ces rotondes, ces obélisques, &c. contribuent à la vraie beauté des jardins de Stowe ; tous ces objets sont purement accessoires & de décoration, & j’ose dire que s’ils étoient supprimés, ces jardins seroient toujours beaux & très-beaux, parce qu’ils sont dans la belle nature, que rien n’y présente l’idée de gêne, de contrainte, de travail, & l’on croiroit qu’ils ne doivent rien à l’art, tant l’art a soin de s’y cacher. Le grand mérite, le mérite capital est d’avoir tiré le parti le plus avantageux des fonds, des élévations, des plateaux, & d’avoir conservé aux points de vue différens leur étendue & leur agrément ; enfin on peut dire que c’est le local lui même qui a décidé le plan de ces jardins, tandis que, pour l’ordinaire, il faut que le local soit soumis au plan de l’architecte. Il est impossible, dans ce dernier cas, d’avoir un jardin naturel. Cette vérité exigeroit des commentaires, des dissertations ; mais comme j’ai cité les ouvrages qui la démontrent, il est inutile que j’entre dans de plus grands détails ; d’ailleurs, ils seront toujours superflus pour l’homme né avec le goût qui lui fait distinguer le beau naturel du prétendu beau factice. Les règles sont utiles aux imaginations froides, lorsqu’il s’agit d’objets de conventions ; mais dans les jardins