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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/121

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plutôt avisé. Si on reste long-temps sous un noyer, on se sent la tête pesante, & le malaise est quelquefois porté au point de donner des envies de vomir : éprouve-t-on cet état fâcheux sous tous les noyers ? non, sans doute ; mais uniquement sous ceux dont les rameaux pendent de tous côtés, presque jusqu’à terre ; alors on se trouve comme sous un toit, sous une espèce de calotte où l’air se renouvelle difficilement ; l’air qui s’échappe du noyer par la transpiration, est un véritable air fixe (voy. ce mot), qui vicie l’air atmosphérique ; mais supprimez jusqu’à une hauteur proportionnée, les branches & les rameaux inférieurs, alors vous établirez un grand courant d’air qui dissipera la mauvaise odeur, & neutralisera l’air fixe qui, plus pesant que le premier, se trouve toujours en bas, quand il n’est pas expulsé.

C’est dans ces avenues que l’on doit principalement semer des noix à demeure, afin que l’arbre pivote, s’élance dans les airs, prenne un port si majestueux & si imposant, qu’aucun autre arbre ne sauroit entrer en concurrence. Alors, l’homme guidé par le luxe ou par la mode, sera satisfait ; l’idée de récolte ne le fatiguera plus, car elle sera très-médiocre. Il pourra même, s’il le veut, faire tailler les branches en palissade du côté opposé à l’allée de l’avenue, faire exercer les ciseaux & le croissant de ses jardiniers, & les branches de l’intérieur formeront d’elles-mêmes le plus beau des berceaux. Qu’il est cruel cet empire du luxe & de la mode ! Il dépeuple d’hommes nos campagnes, les attire dans les villes & anéantit nos arbres les plus précieux, pour leur en substituer d’autres dont le bois est de nulle valeur !

CHAPITRE V.

De la récolte du fruit & de la manière de le conserver.

Plusieurs écrivains qui n’ont connu que Paris, ses environs & quelques-unes des provinces du nord du royaume, regardent la récolte des noix comme de peu de conséquence ; c’est aussi l’opinion de M. Hall, anglois, & son rédacteur rend ainsi sa pensée. « Quoiqu’on élève des noyers principalement dans la vue de s’en procurer le bois, on ne doit point compter sur le profit qu’on peut tirer de leurs fruits. » Ces assertions prouvent tout au plus, que les noyers ne réussissent pas aussi-bien dans ces parties du nord, que dans le centre & au midi de la France. (J’appelle ici nord tout ce qui l’est ou géographiquement, ou pour son élévation ; en un mot, les pays ou sans vignes, ou avec des vignes dont le raisin mûrit à peine.) Si on ouvre le second volume des Mémoires de la société d’agriculture de Bretagne, on y lira, page 241 : « Il vient d’Anjou, de Touraine, & d’autres lieux, une grande quantité de noix dont les droits en entrant en Bretagne, doivent être perçus sur le pied du poinçon. Une contestation entre le receveur & ceux qui font ce commerce, fit désirer de savoir exactement quelle étoit la capacité du poinçon de noix.

» Les recherches qu’il fallut faire à cette occasion, démontrèrent à M. de Montaudouin de quelle importance étoit le commerce des noix pour la