Aller au contenu

Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/139

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pouiller le noyé de ses habits mouillés, à lui essuyer le corps avec des linges chauds & secs, à le mettre dans un lit modérément chaud, à frictionner tout son corps avec des flanelles, pendant très-long-temps ; les frictions ont presque toujours de l’efficacité, & peuvent redonner le mouvement aux parties solides, la fluidité au sang, & rétablir sa circulation avec le concours de la chaleur.

On fera ensuite souffler dans la bouche, par une personne saine & robuste, de l’air chaud, & de la fumée de tabac dans ses poumons, par le moyen d’un entonnoir, ou d’un tuyau de plume ; mais on doit avoir le plus grand soin de boucher ses narines, afin que cet air ne se perde point, & que le noyé en reçoive une assez grande quantité, pour qu’il raréfie, par sa chaleur, l’air qui, mêlé à l’eau, forme l’écume, & le force à se dégager de cette même eau, pour reprendre du ressort, dilater le poumon, & ressusciter, pour ainsi dire, le principe de vie dont les premiers mouvemens s’annoncent par une respiration foible & à peine sensible, & un mouvement presque imperceptible dans l’artère.

C’est dans ce même temps, qu’il faut pratiquer la saignée de la veine jugulaire, comme le moyen le plus propre à rétablir la circulation du sang, à diminuer l’engorgement de la tête, & comme le secours le mieux indiqué en pareille circonstance, d’après les loix de la dérivation, sur-tout si le noyé n’est pas resté long-temps sous l’eau, si son visage est noir ou violet, & si ses yeux sont luisans & tuméfiés, ses membres flexibles, & son corps chaud.

La saignée, au contraire, seroit nuisible, si son corps est glacé, & si ses muscles sont dans un état de roideur.

Après la saignée, l’usage des eaux spiritueuses & volatiles, telles que l’alcali-fluor, l’eau de luce, produisent de bons effets : on peut lui en faire avaler quelques gouttes délayées dans une cueillerée d’eau de mélisse ; chatouiller le gosier avec la barbe d’une plume imprégnée de ces liqueurs volatiles.

L’injection de la fumée de tabac dans l’anus est un secours qu’on ne doit pas négliger. On peut aisément s’en servir en introduisant une canule dans le fondement, ou le tuyau d’une pipe allumée. On enveloppe le fourneau d’un papier percé de plusieurs trous ; on le met dans la bouche, & on souffle de toutes ses forces.

À peine cette fumée a-t-elle pénétré dans les intestins, qu’on entend pour l’ordinaire dans le bas-ventre, un grouillement considérable, toujours suivi d’un effet salutaire, & le malade ne tarde point à reprendre connoissance.

Les poudres fortes & sternutatoires, telles que le tabac d’Espagne, la poudre capitale, celles de romarin & de sauge, doivent être employées, autant pour irriter les organes de l’odorat, que pour procurer une certaine secousse dont le principe de vie a besoin pour reprendre ses mouvemens.

Les bains chauds sont d’une grande ressource : Dumoulin recommande ceux de fumier chaud, de sable de mer, & sur-tout les bains de cendres chaudes : l’efficacité de ces derniers a été constatée. On ne sauroit assez faire connoître l’observation que ce