Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/240

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rection de la racine sur laquelle porte Le sujet, la déchausser sur une longueur de deux à trois pieds, en ménager les chevelus avec soin ; enfin, séparer le sujet & la partie de la racine dont on vient de parler ; alors on plantera véritablement un pied en racine, & dont la reprise sera assurée. On objectera sans doute que l’amputation de cette grosse racine nuira à l’arbre ; je réponds d’avance qu’il ne s’en ressentira pas, & je le prouverai dans la suite à l’article culture.

III. Du déplacement des vieux pieds. Cette opération, est en général ruineuse pour le propriétaire, puisque sur dix pieds replantés il en meurt pour l’ordinaire trois ou quatre. La manière de les transplanter en est presque toujours la cause ; on suppose l’arbre sain & nullement sur le retour : s’il n’est pas en bon état, c’est perdre son temps & son argent que de le transplanter.

À une toise franche au-delà du tronc on commencera à ouvrir une fosse circulaire de deux pieds de diamètre sur une profondeur de trois pieds, & on ira toujours en avant vers le tronc, ainsi qu’il a déjà été dit. Si au-dessous de la profondeur de trois pieds on trouve des racines pivotantes, on les coupera proprement avec la hache, & on travaillera toujours circulairement en se dirigeant contre le centre, de manière que l’arbre puisse être levé tout d’une pièce, & on conservera la plus grande étendue possible aux racines. Je multiplie, j’en conviens, la dépense & l’emploi du temps, mais exista-t-il jamais un arbre plus précieux, & dont la perte soit plus difficile à réparer ? Cette considération doit entrer pour beaucoup dans l’opération. La perte d’un bel olivier n’est-elle pas plus préjudiciable au propriétaire, que celle de quelque argent ? J’ai une suite d’expériences faites avec le plus grand soin, qui prouvent que moins on laisse de racines à un olivier, plus sa reprise est difficile, & moins promptement il donne des rameaux forts & vigoureux.

D’après la plus mauvaise de toutes les méthodes, on a la coutume de sacrifier toutes les racines, de ne laisser à l’arbre que sa souche décharnée. Pourquoi la nature lui avoit-elle donc donné des racines ? Si cette souche, pour l’existence & la subsistance du tronc, est obligée d’en pousser de nouvelles, à plus forte raison les anciennes lui sont nécessaires. Comme les raisonnemens ne détruiront jamais les préjugés du peuple, & combien de grands propriétaires ne sont-ils pas peuples à ce sujet ! J’invite à faire le sacrifice de deux arbres, dont l’un sera planté avec le plus grand nombre de racines, & l’autre avec la simple souche bien déchaussée, bien décharnée, bien mutilée, suivant la coutume, & on jugera à la troisième année lequel des deux arbres aura le mieux profité. J’ai été à même de faire un grand nombre de déplacemens semblables. J’ai laissé à mon maître valet la conduite d’un pied d’olivier bien dépourvu de racines latérales ; cet arbre est mort & la végétation des autres auxquels je n’ai rien retranché, est très-belle. Cependant on a donné à ces arbres les mêmes irrigations & les mêmes travaux ; enfin, ils ont été plantés dans le même champ. On ne me persuadera jamais que l’amputation des racines soit avantageuse. Si ce qu’on nomme un souquet, si un éclat de racine, si des tronçons, &c. poussent des racines & des bourgeons, si enfin il en résulte des arbres, à plus forte