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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/295

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dans la fleur de chou, de raves, &c. La partie supérieure qui s’étend horizontalement est appelée la lame.


ONGUENT. Médicament de consistance plus molle que dure, principalement destiné au traitement des maladies extérieures, depuis la plus légère égratignure jusqu’à l’ulcère le plus sordide. On trouve chez l’apothicaire l’onguent qu’on s’imagine devoir être employé à la guérison. Si la plaie se cicatrise, l’onguent est réputé admirable ; si au contraire elle subsiste malgré l’application des topiques, on s’en prend à la nature, & dans les deux cas on se trompe grossièrement. Dans le premier, la nature seule a agi plus lentement que si l’on n’avoit point mis d’onguent, & dans le second, l’onguent a visiblement contrarié les efforts de la nature. Les grands médecins & les grands chirurgiens de ce siècle, l’académie même de chirurgie de Paris a prouvé, en couronnant le Mémoire de M. Champeaux, que les plaies simples, les brûlures, &c. n’exigeaient d’autres traitemens que d’être soustraites à l’action de l’air atmosphérique, & tenues humectées avec de simples compresses imbibées d’eau pure ou un peu acidulée par le vinaigre, s’il survenoit quelque inflammation. Ils ont encore prouvé & démontré que si la plaie étoit produite par un vice intérieur, on auroit beau appliquer tous les onguens de l’univers, on ne la guériroit jamais sans attaquer le vice primitif : la cause détruite, l’effet l’est bientôt de lui-même. La crédulité ou la charlatanerie firent imaginer les compositions des onguens ; l’ignorance a perpétué l’usage de ces médicamens : enfin le bon sens & la raison, guidés par l’expérience, ont levé le voile dont se couvroit l’intérêt de l’homme agissant sans principes. Des décoctions de plantes valent mieux que l’usage des onguens, & elles coûtent beaucoup moins ; il suffit de s’en servir avec connoissance de cause. Si je ne craignois d’être taxé d’homme tranchant, j’oserois avancer que l’eau simple ou de rivière, l’eau saturée d’air fixe (voyez ce mot) suffisent pour toutes les plaies sanieuses. L’eau aiguisée par un peu de vinaigre de vin, ou l’eau végéto-minérale de Goulard suffisent pour tous les cas où l’inflammation se manifeste ; il faut alors tenir les compresses sans cesse imbibées. L’aveugle crédulité a été portée au point de se figurer que plus un onguent étoit chargé de drogues, & plus il avoit d’efficacité. De là sont nées ces formules compliquées, où l’on associe des substances qui ne sont pas faites pour être réunies, & dont l’effet de l’une détruit celui de l’autre. Un homme de bon sens, mais quelquefois un peu cinique, disoit un jour que le meilleur des onguens étoit bon à jeter par les fenêtres, & que s’il en existoit un bon, ce devoit être celui qui étoit aussi simple que la marche de la nature. Les pharmacopées sont très-multipliées, mais dans aucune les formules du même onguent ne sont semblables. Celle-ci est composée de vingt drogues, & celle-là de cinq à six. Cependant les plaies se ferment, se cicatrisent avec tous les deux : ce n’est donc pas l’onguent qui a opéré la guérison. Si la préparation est mal combinée, soit par ignorance, soit par économie ; si elle est faite avec de vieilles