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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/489

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tous marchands « de mettre, tant dans leur étalage que sur les cruches qui contiennent lesdites huiles, des écritaux indicatifs conçus en ces termes : huile de pavot dite d’œillette, & leur fait très-expresses défenses de vendre l’huile de pavot pour l’huile d’olives ; pareillement de mêler & de mixtionner & changer l’huile d’olives avec l’huile de pavot, à peine, pour la première fois de contravention, d’amende de 3000 liv. envers le roi, &c. »

L’avidité du gain ferma encore les yeux sur la juste rigueur de la loi, les mixtionneurs ne virent qu’un bénéfice excessif, & ils continuèrent leurs manipulations frauduleuses. Les choses restèrent ainsi jusqu’au commencement de 1735. Sur des plaintes faites à cette époque, survint une nouvelle sentence du châtelet, du 11 mars de cette année, qui ordonne aux gardes épiciers « de mêler l’essence de térébenthine dans une botte[1] mixtionnée d’huile de pavot saisie sur un marchand, &c. »

Ces sentences ne suffisoient pas aux désirs de ceux qui demandoient la suppression de l’huile d’œillette. Le 6 juillet 1741, survint une autre sentence du châtelet sur la requête des maîtres-gardes épiciers, par laquelle, pour prévenir la fraude & la mixtion, il est ordonne « que toutes les huiles d’œillets seront conduites au bureau des maîtres-gardes épiciers, & que là, en leur présence, pour empêcher que l’huile d’œillette soit vendue pour huile d’olives, il sera jeté dans chaque baril d’huile d’œillette, une livre d’essence de térébenthine. Voilà donc l’huile d’œillette pure totalement défendue par la loi, quoique la loi ne la déclare ni dangereuse ni mauvaise. Ainsi les spéculateurs n’avoient encore gagné leur cause qu’à demi ; mais le 22 décembre 1754, parurent des lettres-patentes enregistrées en parlement le 29 janvier 1755, dans desquelles il est dit : » Sur ce qui nous a été représenté que l’huile de pavot, appelée communément huile d’œillette, ayant de tout temps été reconnue d’un usage pernicieux, il avoit été ordonné qu’elle ne pourroit être débitée dans le commerce sans être auparavant gâtée par l’essence de térébenthine, mais que les soins que l’on a pris pour procurer l’exécution de ces réglemens, ont été éludés, soit par le déguisement des vaisseaux, soit par les entrepôts de cette marchandise, ce qui peu causer des effets extrêmement dangereux. Voulant, &c. ordonnons, 1°. qu’à compter du jour de la publication des présentes, l’huile de pavot, dite d’œillette, sera mélangé avec l’essence de térébenthine dans le moulin même de la fabrication, en jetant une livre & demie de ladite essence dans chaque baril pesant net deux cents livres d’huile d’œillette, » &. à proportion dans les vaisseaux

  1. Tonneau dans lequel l’huile est envoyée. Chaque botte, déduction faite du bois ; pèse net 1100 liv. La seule ville de Paris consomme plus de 2000 bottes d’huile par année.