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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/56

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s’en occupera lorsque cet arbre sera plus abondant.

J’insiste sur l’avantage des taillis de mûriers par plusieurs raisons : 1°. une plus grande abondance de feuilles ; 2°. relativement aux bois de chauffage ; 3°. aux échalas ; 4°. parce que leurs vastes souches & leurs racines superficielles empêcheront que les pluies d’orage n’entraînent le sol. C’est pour avoir, mal à propos, coupé tous les arbres dont étoit couverte cette longue chaîne de montagnes qui traverse le Languedoc de l’est à l’ouest, qu’on n’y voit aujourd’hui que le rocher le plus sec & le plus aride ; il en est de même dans le reste du royaume. (Consultez le mot Défrichement).

Tous les arbres des pépinières qui ne pourront servir aux plantations de mûriers à plein vent ou nains, seront utiles dans les taillis, à moins que le vice qui les fait rejeter ne dépende des racines. Dans ce cas, c’est un arbre à jeter au feu. S’il est possible d’ouvrir une espèce de fosse dans les cavités, dans les scissures des rochers, on la fera pour recevoir cet arbre. Si le rocher ne présente que des scissures, il vaut mieux, avec une aiguille ou pic de fer, ouvrir un trou à une certaine profondeur, y planter une jeune pourrette avec son pivot ; enfin remplir de terre ce trou, & couper la petite tige au niveau du sol, ce dernier, une fois repris y profitera beaucoup plus que l’autre, & ainsi de suite, & autant qu’on le pourra dans toutes les fentes des rochers. Mais, dira-t-on, ce seront des arbres perdus, dont on n’ira pas recueillir la feuille ; je le veux bien : mais au moins, ils serviront à former de la terre végétale, qui, entraînée par les eaux, bonifiera les champs qui sont au dessous, & on aura, tous les quatre, cinq à six ans, du bois de chauffage lorsque l’on coupera tous les jets par le pied ; ce qui formera la tête de la souche, d’où s’élèveront, dans le cours des années suivantes, un grand nombre de tiges, & qu’on, traitera successivement comme celle des taillis.

Si on a des terrains que l’on ne veuille pas cultiver en grain, soit à raison de leur pente trop rapide, soit à cause de leur peu de qualité, soit enfin par rapport à leur éloignement de la métairie, il convient de les sacrifier aux taillis. On ouvre des fosses à six pieds de distance en tout sens, on plante un mûrier rebut de pépinière, & on le recèpe près de terre. Je préfère les pourrettes garnies de leurs pivots ; si ce pivot peut une fois gagner en nouvelle profondeur, on est assuré d’avoir, dans la suite, une tête très-vigoureuse. Il faudra, il est vrai, travailler la terre pendant un plus grand nombre d’années, que pour les arbres dont le collet des racines est déjà fort, mais la pourrette étant devenue forte & après son premier recepage, produira de très-belles tiges propres aux échalas, &c. Si le local le permet, on peut recueillir la feuille de taillis, comme celle des mûriers nains ou à plein vent, après la seconde année de la coupe, & cette récolte subsistera pendant les années suivantes, jusqu’à une nouvelle coupe. Une fois que les têtes sont formées, l’arbre ne demande plus aucune culture, & chaque saison augmente la bonté du sol par la chute & la pourriture des feuilles ;