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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/802

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PIVOT. Mère-racine, placée directement sous le tronc de l’arbre, & qui s’enfonce perpendiculairement en terre. Si on examine avec un peu de soin, par exemple, une amande, si on la jette dans l’eau chaude, afin de la dérober, c’est-à-dire dépouiller l’amande proprement dire de la pellicule qui l’environne, on voit qu’elle se partage naturellement en deux portions ordinairement égales, & dont l’intérieure est lisse. Ces deux portions ou lobes, ne sont que juxtaposées l’une contre l’autre, & maintenues telles par leur enveloppe. Au haut de chacun de ces deux lobes, c’est-à-dire du côté le plus pointu, on voit une petite cavité dans laquelle le germe est implanté, & la pointe du germe termine la pointe de l’amande ; lors de la végétation ce germe s’élance, & produit ce qu’on appelle la radicule ou rudiment de toutes les racines. Cette radicule s’enfonce en terre, & produit le pivot ou mère-racine, racine majeure, racine primitive, & pendant qu’elle s’enfonce, les deux lobes fermés sont poussés hors de terre, & lorsqu’ils y sont parvenus, ils s’ouvrent pour laisser à la plantule la facilité & s’élancer & de devenir le rudiment de la tige, des branches, &c. ; ces lobes, autrement nommés cotylédons, subsistent jusqu’à ce que l’extrémité supérieure de la tige ait développé une ou deux feuilles, & jusqu’à cette époque ils tiennent lieu de feuilles ; mais lorsqu’elles paroissent, la radicule a déjà fait de grands progrès, & elle s’est enfoncée profondément. La conséquence à tirer de ce simple apperçu, est que la loi de la nature oblige les tiges à s’élever, & la racine-mère à pivoter, à s’enfoncer. C’est donc contrarier la marche & la loi de la nature, que de suprimer le pivot à un arbre que l’on replante, puisque la nature n’a jamais rien fait en vain ; si elle suit cette loi générale & immuable pour tous les arbres, il est donc ridicule à l’homme de s’en écarter, & plus ridicule encore de penser qu’il en sait plus qu’elle ; c’est cependant la seule conséquence à tirer, & écrite en gros caractères, d’après la conduite journalière des jardiniers, des pépiniéristes. Il y a plus ; ils ont rédigé un code qui fixe la manière & l’art de mutiler les racines, & la sentence de mort contre le pivot.

Quelles raisons apportent-ils pour justifier ces préceptes barbares. C’est vous disent-ils, afin d’obliger l’arbre à pousser de nouvelles racines. Il vaut tout autant dire qu’on doit exténuer un homme qui se porte bien, en lui empêchant de se nourrir, pour qu’ensuite il trouve le pain meilleur. Si l’arbre végète avec son pivot, pourquoi donc en exiger le sacrifice ! que l’on ne soit plus surpris si cet arbre est si long-temps à se remettre de cette si terrible épreuve, & si parmi le nombre de ceux que l’on plante, il en périt la majeure partie ; je suis même étonné que ce nombre ne soit pas plus considérable.

Lorsque vers l’époque du mouvement de la séve, je fais l’amputation d’une forte branche d’un arbre à noyau, je vois bientôt la séve s’extravaser par la plaie, & se convertir en gomme par l’évaporation de l’humide. Eh bien, ce qui survient à cette partie extérieure, arrive également à la plaie faite par l’amputation du pivot. La terre qui y