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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/368

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Cette opération a lieu à la fin de février ou au commencement de mars ; la saison la décide. La couche est recouverte par des chassis garnis de papiers huilés, à la place de vitres. On les ouvre & on les ferme suivant les besoins & les circonstances. Elles sont communément placées derrière les étendoirs ou séchoirs qui les abrite du vent du nord. Si le froid survient, si la chaleur nécessaire à la couche diminue, on la renouvelle en changeant les réchauds. (Consultez l’article COUCHE) Si la chaleur se soutient, la terre se sèche, on arrose au besoin.

Pendant que la graine germe, que la plante végète & se fortifie sur cette couche, on en prépare d’autres dans le voisinage, & d’un génie différent. On creuse le terrain à quelques pouces de profondeur, pour faire ces couches ; & un sentier de six à huit pouces de largeur, les sépare les unes des autres ; leurs bases est de deux pieds & demi, leur hauteur de deux pieds, leur talus de trois pouces ; de sorte que dans le haut il n’y a que deux pieds de largeur, sur une longueur indéterminée, & à peu de chose près de l’étendue du local. Leur direction est du nord au midi. À six ou huit pouces de hauteur, au-dessus du niveau du fossé, on met un rang d’un pouce & demi d’épaisseur, de fumier de mouton très-fin & très-menu ; par-dessus, six pouces de terre bien fumée, & ainsi de suite, lits par lits, jusqu’à la hauteur désignée. Ce fumier provient des moutons qu’on a nourris dans des étables pendant l’hiver avec de grosses fèves hachées : c’est le plus cher, le meilleur & le plus recherché.

Lorsque tout est prêt, les jeunes plançons sont levés à la fin d’avril ou au commencement de mai, suivant la saison, de dessus la première couche, & sont transportés sur les couches nouvelles. On les plante sur deux rangs, à trois pouces des bords, & à la distance d’un pied l’un de l’autre. On a grand soin de sarcler souvent les couches & les sentiers. Ces sentiers ont deux avantages ; le premier de conduire les eaux, & le second de procurer la commodité de sarcler. On choisit, pour replanter les plançons, un jour couvert & un peu pluvieux.

Quand les quatre premières bonnes feuilles sont venues, on coupe la tige au-dessus, & on l’appelle couronne, & on a grand soin d’arracher les jets qui poussent des aisselles des feuilles supérieures, dès qu’ils paroissent. Ces jets qu’on appelle larons, empêcheroient la grande poussée, & priveroient de nourriture les bonnes feuilles.

Les champs plantés en tabac sont environnés de haies très-élevées, ou par des plantations d’aunes ou vernes (consultez ce mot) : c’est sans doute pour garantir les plantes des coups de vent. Tous les champs ainsi environnés, ont la forme d’un parallélogramme du nord au midi.

La récolte des feuilles est l’ouvrage des femmes ; elles les cassent avec les doigts de la main droite, & elles les jettent sur le bras gauche sans les froisser. Lorsqu’elles en ont un paquet, il est remis à l’homme qui les suit. Lorsqu’il en a une forte brassée, il les met dans un panier où il les arrange paquet par paquet, sans les froisser : les feuilles, sont ainsi portées au séchoir ; les feuilles in-