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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/50

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montrée par les hémorragies critiques, les inflammations, les épanchemens, &c.

Dans tous ces cas la saignée doit être faite dans le siège du mal, ou du moins aussi près qu’il est possible, pour imiter la nature dans les hémorragies critiques, & pour se conformer aux loix du mouvement les plus simples ; c’est ainsi qu’on ouvre les varices quelconques, qu’on scarifie les yeux enflammés & les plaies engorgées, qu’on saigne au dessous d’une compression forte qui est la cause d’un engorgement, qu’on ouvre les veines jugulaires dans plusieurs maladies de la tête avec succès, & qu’on éprouve continuellement de ces saignées locales des effets avantageux. Qui ne riroit d’un médecin vétérinaire qui ouvriroit la saphène pour dissiper l’engorgement inflammatoire des glandes parotides ? ici l’expérience vient constamment à l’appui de la raison ; l’une & l’autre veulent qu’on attaque le mal dans son siège & qu’on vuide le canal par une ouverture faite au canal lui même, sans recourir aux branches les plus éloignées.

Comme la flamme ne seroit pas toujours un instrument propre à attaquer le mal dans son siège, on peut y suppléer par les sangsues, par les ventouses sèches ou humides ; elles sont indiquées dans le vertigo idiomatique, dans l’inflammation des yeux, dans celle des reins, dans la suppression & rétention d’urine, dans l’apoplexie sanguine, dans l’inflammation des mamelles des jumens & des vaches qui allaitent, &c. &c.

Avant que d’appliquer les sangsues, on les lave dans de l’eau ; ensuite on échauffe la partie dont on veut tirer le sang, en la frottant ou en la mouillant avec de l’eau tiède, du lait chaud, ou du sang de pigeon. Sans l’un ou l’autre de ces moyens, elles s’attacheroient difficilement. Dès qu’elles sont gorgées de sang, elles quittent prise pour l’ordinaire ; mais si l’on juge que la quantité de sang qu’elles ont tiré ne suffit pas, on coupe la queue des sangsues, afin que le sang quelles sucent de plus, puisse couler par cette ouverture. Quand on juge qu’elles ont assez tiré de sang, on leur jette sur le corps du sel, des cendres, ou on les coupe, le plus près qu’il est possible, de la tête. Le sang s’arrête pour l’ordinaire dès qu’elles ont cessé de sucer ; s’il arrivoit qu’il ne s’arrêtât pas, il faudroit appliquer sur les petites ouvertures de l’amadou ou de l’agaric, qu’on assujettit au moyen d’une compresse & d’une bande.

Quand il s’agit d’appliquer les sangsues dans l’intérieur des naseaux, &c., il faut user de beaucoup de précaution & d’adresse, afin qu’elles ne pénètrent point dans les cavités plus avant qu’on ne le désire ; accident qui, comme on le sent assez, mettroit la vie de l’animal en danger : si par malheur elles venoient à se glisser dans l’estomac par les nasaux, il faudroit sur le champ faire avaler force eau salée, ou du vinaigre, ou des purgatifs, & des lavemens âcres, afin de les empêcher de pincer ces parties & d’en sucer le sang : si elles étoient arrêtées dans les nasaux, de forts sternutatoires les feroient rejeter.

Les sangsues s’attachent quelquefois aux jambes, sous le ventre & à d’autres parties du corps des chevaux qui vont dans des mares d’eau pour manger les joncs ou la lèche ;