Aller au contenu

Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/64

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pourvu qu’elle ne soit pas trop enterrée. On en a sans cesse l’exemple sous les yeux ; il suffit de regarder un champ sur lequel on a laissé grainer l’esparcette. Il tombe beaucoup de graines pendant la récolte, & ces graines, quoiqu’exposées, à la pluie, au soleil, aux frimats, germent dès que la température de l’air est au point nécessaire pour développer leur germination. Peu importe au paysan, & à celui qui vend cette graine, si elle germe ailleurs ; il en a reçu le prix, & il est satisfait. Mais le propriétaire attentif, & qui travaille pour lui, attend que son esparcette soit dans sa plus grande force ; c’est ordinairement à la troisième année ; il sacrifie un coin de son champ où il la laisse grainer, il la récolte, & la conserve soigneusement pour lui. Si son ami a de très belle graine dans un pays montagneux, il échange avec lui celle qu’il a récoltée dans la plaine, & tous deux gagnent beaucoup dans cet échange réciproque. En général, on n’est pas assez scrupuleux sur le changement de semences, & leur transport d’un canton dans un autre ; cependant il en résulte de grands avantages, dont je ne parlerai pas ici, parce que la question est déja traitée dans le chapitre troisième de l’article Froment, tome V, page 108.

Habitans des campagnes pauvres, remerciez le ciel de vous avoir procuré la connoissance du sainfoin. Cette plante est pour vous presque aussi précieuse que le seigle, puisqu’elle vous fournit les moyens de le cultiver en nourrissant votre bétail.


CHAPITRE II.

Du Sainfoin d’Espagne, ou Sulla ou Scilla.

Les papiers publics ne se lassent pas depuis long-temps de préconiser la culture de cette plante. Il est temps de mettre le lecteur à même de la juger & de prononcer sur la juste valeur. C’est pourquoi j’ai cru nécessaire d’en faire un article à part, & de ne pas le confondre dans l’article du sainfoin ordinaire.


Section Première.

Description du Sulla.

Tournefort le place dans la troisième section de la dixième classe destinée aux herbes à fleurs de plusieurs pièces, irrégulière & en papillon, dont le pistil devient une gousse articulée, & il l’appelle hedisarum clypeatum flore suaviter rubente Von-Linné le place dans la même classe & le même genre que le sainfoin ordinaire, & le nomme hedisarum coronarium.

La fleur a les mêmes caractères que celle du sainfoin ordinaire, elle n’en diffère que par sa grandeur, qui est du double, & par sa couleur d’un beau rouge vif.

Fruit ; légume long, aplati, nu, droit, hérisse de pointes, qui diffère de celui du sainfoin ordinaire par ses articulations marquées comme celles d’une chaîne.

Feuilles ; ailées, très-amples, terminées par une foliole impaire plus grande que les autres ; les folioles ovales, épaisses, charnues.