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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/177

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Observations.

Les frais de culture, dans le territoire Laonois, sont à-peu-près les mêmes que dans celui du Soissonois. Les vins du Laonois ont moins de qualité que ces derniers ; mais des circonstances locales leur donnent un plus haut prix.

Une lecture attentive de ces divers tableaux doit convaincre que la plus mauvaise méthode de cultiver les vignes, est celle qui se fait à moitié ou par métayers, comme dans une partie des territoires des ci-devant Aunis, Bas-Limosin, Nivernois, Berri, Franche-Comté, etc. Par elle, l’ouvrier meurt de faim et le propriétaire admet, comme rente, de petites rentrées qui ne forment en effet qu’un revenu apparent, puisqu’il n’introduit au compte des dépenses, ni l’intérêt de ses premières avances, ni aucune des reprises auxquelles il a droit.

Il en est bien autrement de la grande culture, dirigée par une main sage et libérale. Celle-ci veut de fortes avances, il est vrai ; mais elles ne restent jamais infructueuses. Voyez les inventaires du ci-devant Lyonnois, de la Bourgogne, du département de la Marne et même du Soissonois ; ils vous donneront encore l’occasion de vous assurer qu’il faut être dans l’aisance pour faire cultiver la vigne avec avantage. À qui appartenoit, avant la révolution, la plus grande partie des vignobles les plus célèbres et les plus lucratifs de la France ? aux moines ; c’est-à-dire, à la classe la plus aisée des citoyens. Les moyens d’améliorer de renouveller ne leur manquoient jamais. Aussi les capitaux, que leurs biens en vignes étoient censés représenter, toutes les avances, toutes les reprises de droit déduites, ne donnoient pas un intérêt au-dessous de neuf à douze pour cent, par an ; intérêt très-considérable pour des capitaux placés en terres ; et immense, quand on considère la foible qualité de celles qui conviennent à la vigne. Qu’on se garde donc bien, comme l’ont fait quelques écrivains irréfléchis, de confondre la culture de la vigne en général, avec le mode de la cultiver ; et parce qu’il y a des ouvriers-vignerons à la mendicité et des propriétaires de vignes dans l’indigence, de demander l’arrachage ou la suppression d’une partie de nos vignes. L’intérêt bien entendu des particuliers et de l’état rejette bien loin cet absurde système.

Pour que la proposition fût admissible, il faudroit que le terrein qu’occupent les vignes, manquât à la reproduction d’une denrée plus précieuse, à celle du blé ; ou que le vin fût tellement commun en France, que ses habitans, suffisamment abreuvés de cette liqueur, et les demandes des étrangers plus que satisfaites à cet égard, il y en eût un excédent en pure perte pour l’état comme pour les propriétaires. Mais combien il s’en