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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/466

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le vinaigrier procède à la préparation du vinaigre, il commence par imbiber les tonneaux du levain ou ferment qui doit exciter dans le vin la fermentation acéteuse. Pour cet effet, il verse dans chaque mère cent pintes ou environ cent douze litres de bon vinaigre bouillant et l’y laisse séjourner pendant huit jours. Ce temps étant écoulé, il ajoute dans chaque mère un broc de vin contenant dix pintes, ou environ onze litres. Il continue ainsi de huit jours en huit jours à en verser la même quantité, jusqu’à ce que ses vaisseaux soient pleins ; le vinaigrier laisse alors écouler un espace de quinze jours avant de mettre le vinaigre en vente, et il a l’attention de ne jamais vider ces mères ; elles restent toujours à moitié pleines, afin qu’en les remplissant successivement, elles puissent déterminer le changement du nouveau vin en vinaigre.

Voici les signes auxquels les vinaigriers reconnoissent que leurs mères de vinaigre travaillent bien, c’est-à-dire, que la fermentation y est plus acéteuse. Ils ont soin d’introduire, par le trou supérieur, une règle de deux pieds de longueur faite avec une douelle à barrique ; ils la plongent dans le vinaigre et la retirent aussitôt ; ils examinent le sommet de la partie mouillée, et s’ils y aperçoivent une espèce de ligne blanche, formée par la fleur ou écume du vinaigre en fermentation, ils jugent que la mère travaille ; plus la ligne est large et fortement marquée, plus la mère travaille bien et a besoin d’être rafraîchie ; alors ils la chargent plus souvent. Ils attendent, au contraire, et n’ajoutent point de nouveau vin dans celle qui ne donne pas cet indice ou qui le donne foible.

Un soin essentiel qu’il ne faut pas omettre est celui de n’employer qu’un vin très-clair. Pour se procurer cet avantage, le vinaigrier renferme cette liqueur dans des tonneaux où il a établi un rapé de copeaux de hêtre, afin que les surfaces étant plus multipliées, la lie fine puisse mieux y adhérer. C’est de ces tonneaux à rapé qu’il soutire le vin à mesure qu’il en a besoin. Cette pratique suffiroit seule pour détruire l’opinion où l’on est que la lie est un levain propre à exciter la fermentation acéteuse.

L’atelier du vinaigrier étant ordinairement placé dans un lieu très-aéré, la chaleur de l’atmosphère suffit en été pour convertir le vin en vinaigre ; mais en hiver, le vinaigrier a soin d’entretenir une température élevée de 18 degrés au moins, par le moyen d’un poêle qui est établi dans le milieu de l’atelier.


Deuxième pnoccilê.

On achète un baril de vinaigre de la meilleure qualité et on en tire quelques litres pour l’usage domestique qu’on remplace par une même quantité de vin bien clair ; l’on bouche simplement le baril avec du papier ou du liége appliqué légèrement : on le tient dans un endroit tempéré, et tous les mois on en soutire la quantité susmentionnée de vinaigre en la