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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/137

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sules qu’elles jouissent encore d’une sorte de vitalité, c’est là qu’elles se perfectionnent, que leurs parties constituantes se combinent, se dessèchent spontanément, et éprouvent ce qu’on appelle le ressuement. Les jardiniers maraîchers n’auroient pas l’espoir d’avoir un succès aussi complet dans leurs semis, s’ils ne conservoient ainsi leurs graines d’ognon, de poireau et de plusieurs autres espèces. Quelque avantageuse que soit la conservation des graines dans les enveloppes, ce moyen n’est pas toujours praticable, et il y en a qu’on est obligé de séparer aussitôt qu’elles ont atteint leur point de maturité ; alors on doit les battre sur une aire ou sur un tonneau défoncé, prendre garde que la première qui tombe étant ordinairement la plus mûre, la plus nourrie et la plus sèche, il convient, au moment de la récolte, de la séparer de la seconde, et, pour ne pas mélanger les espèces ou variétés de graines, d’y attacher des étiquettes, placées de manière à ce que le vent ne pusse les emporter.

Il faut que l’emplacement où l’on se propose de battre les graines soit bien nettoyé, avoir l’attention, quand on vient à une autre espèce, qu’il n’en reste point de la première, et ne jamais resserrer qu’au préalable elles n’aient été exposées à l’air, séchées et vannées. Lorsque la récolte de ces graines se fait un peu tard dans la saison, il faut les étendre par lits très-minces, dans un lieu sec, les remuer souvent, et les placer, s’il est possible, sur des claies ou des planches un peu élevées, et les mettre à l’air toutes les fois que le temps est sec. L’exposition des graines à toute l’ardeur du soleil, ne sauroit être suivie d’aucun inconvénient, toutefois si elles n’y demeurent pas trop long-temps après leur entière dessication ; il n’en est pas de même de la chaleur artificielle qu’on seroit forcé de leur appliquer, soit que l’humidité s’y trouveroit par surabondance, soit parce qu’elles auroient éprouvé des avaries, ou que, pour les expédier à temps, du nord au midi, on voudroit hâter leur dessiccation ; il faut que cette chaleur soit graduée et proportionnée à la nature des graines, et, dans tous les cas, prendre garde que son action ne se porte immédiatement sur le germe ; car si la semence, sur-tout quand elle est récemment recueillie, est mise au four ou exposée à toute autre chaleur vive, ce germe éprouve un commencement de cuisson, l’humidité propre de la graine se combine avec les autres principes constituans, d’où résulte cet effet qu’on exprime par tuer le germe, c’est-à-dire opérer l’anéantissement de la faculté reproductrice.

Conservation des graines. La graine d’une plante sauvage se conserve beau-coup plus long-temps que celle d’une plante cultivée, toutes choses égales d’ailleurs ; mais une fois récoltée avec les soins recommandés, on doit s’occuper de la garantir de la moisissure, de la fermentation, du rancissement et d’une trop grande dessiccation, en les plaçant, dans un lieu plutôt froid que chaud, à l’abri de la trop vive lumière et de l’ardeur du soleil, et en veillant attentivement à ce que les rats, souris, les insectes n’y aient aucun accès : le choix du local mérite la plus sérieuse attention : Vilmorin, dans le premier volume des Annales de l’Agriculture française, publié par notre collègue Tessier, insiste beaucoup sur ce point, et la Société d’encouragement pour l’industrie nationale, qui en a senti toute l’importance, en a fait le sujet d’un prix.

Chaque espèce de graine doit être mise séparément dans un bocal, dans une boîte, dans des tiroirs ou dans des sacs de toile à mailles claires ; mais il faut prendre garde d’entasser ces sacs et de les placer sur le carreau et auprès du mur, en les tenant isolés, autant qu’il