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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/162

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couche d’aubier conservée sous l’écusson ; à la pousse, lorsque la tête du sauvageon est coupée immédiatement après la pose de la greffe ; à œil dormant, lorsque la tête du sujet est conservée jusqu’au printemps suivant ; avec chevron brisé, lorsqu’on fait une incision au dessus des écussons. Ou emploie cette dernière sur les arbres résineux ou trop abondans en sève.

Les précautions à prendre pour se procurer des greffes sûres, consistent dans le choix des rameaux, et dans le temps de les cueillir. On doit employer uniquement celles de la dernière ou de l’avant-dernière pousse, et dont les yeux sont bien formés, les cueillir pendant l’hiver, pour les greffes en fente, et à l’instant de greffer, pour les greffes en écusson.

Les yeux du milieu des rameaux sont meilleurs pour les greffes en écusson, et les quatre ou cinq yeux inférieurs pour les greffes en fente.

On conserve dans le cellier, en terre, les rameaux à greffes en fente, et on met dans l’eau, ou on enveloppe de mousse fraîche ceux en écusson, après en avoir coupé les feuilles.

Lorsqu’on veut les faire voyager, on les fiche dans un fruit aqueux, ou dans de l’argile mouillée, ou on les met dans des boîtes avec de la mousse ou autre herbe fraîche.

Les analogies convenables à la réussite des greffes consistent dans l’organisation interne qui s’annonce par la configuration des parties externes, dans la densité des bois : un bois dur reprendra difficilement sur un bois tendre ; dans la chute ou la permanence des feuilles : un arbre toujours vert, peut reprendre sur un arbre qui se dépouille, et vice versa ; mais ils ne vivront pas long-temps ensemble : dans le mouvement de la sève qui doit monter et descendre en même temps dans le sujet greffé et dans celui qu’on greffe ; dans les sucs propres qui doivent avoir les mêmes qualités : une sève caustique se mélange difficilement avec un suc doux.

Traçons maintenant de quelle manière on doit opérer chacune de ces greffes, en suivant le même ordre, mais en passant sous silence les méthodes déjà exposées dans le Cours.

1°. Greffes par approche sur tronc. Deux arbres, l’un sauvageon, l’autre à bons fruits, se trouvent placés à quelques pieds de distance ; le sauvageon est jeune et plein de vigueur, l’arbre à bons fruits est vieux, sur le retour, son tronc est vicié et annonce un dépérissement prochain. Il convient, dans ce cas, de reprendre en sous-œuvre l’arbre à bons fruits, de replacer sa tête sur une bonne souche, et de le rajeunir. Pour y parvenir, on rapproche les deux troncs au point de se toucher dans une partie ; on fait une incision parfaitement semblable à chaque tronc au point de contact ; on réunit les deux plaies de manière que les écorces coïncident exactement ; on les lie avec de la ficelle, on place dessus un emplâtre d’onguent de Saint-Fiacre ; on recouvre le tout avec de la paille, ou mieux encore avec de la toile ; on diminue le volume de la tête des deux arbres, pour donner moins de prise au vent ; après la reprise, on supprime la tête du sauvageon. On enlève ensuite ou on laisse, si on le juge à propos, la souche du franc.

Un arbre dans la rigueur de l’âge est cassé par le vent, ou quelque autre accident, au dessus de la greffe et dans une ligne de pleins vents : on veut profiter d’un beau tronc desservi par un grand nombre de racines excellentes et susceptibles de fournir à une végétation rapide et durable. On doit alors employer la seconde espèce de greffe par approche. La plaie du tronc cassé est d’abord parée avec soin, puis couverte d’onguent de Saint-Fiacre. Dans l’automne, on plante à peu de distance du tronc un arbre déjà fort. Au printemps suivant, lors du mouvement de la sève, on fait au tronc une entaille triangulaire sur la partie de son diamètre qui regarde le jeune arbre qu’il doit recevoir. On fait à la tige du jeune arbre, au point où il doit s’unir au tronc, deux entailles dont le résultat doit être que la plaie faite au jeune arbre forme le coin qui doit remplir le vide du tronc ; on réunit la tige du jeune arbre au tronc, en ayant l’attention de faire coïncider exactement les écorces. On ligature les deux arbres, pour qu’ils n’éprouvent point d’oscillations ; on couvre ce qui reste de plaie apparente avec l’onguent, et l’opération est terminée.

Veut-on activer la végétation d’un grand arbre, auquel on attache du prix, doubler la durée de son existence, et enfin lui donner une vigueur surnaturelle ? on emploie la greffe en étai. Cette greffe a pour but de multiplier les bouches nourricières des arbres, sans accroître sensiblement leurs moyens de déperdition. Elle consiste à réunir plusieurs troncs, pour subvenir à la consommation d’une seule tête. Des jeunes troncs sains et munis d’une grande quantité de racines étendues au loin, entés sous une tête dont le tronc est débile et suranné, lui portent toute la vigueur du jeune âge. Ainsi, aux deux côtés de l’arbre