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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/168

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resse ne s’opposent pas à leur développement ; mais, avouons-le, il reste bien peu de ressources quand c’est dans le courant d’août que ce fléau a désolé nos champs.

Tout le monde sait que plusieurs espèces de cultures peuvent encore être entreprises vers le milieu de juillet, et même au commencement d’août, lorsqu’on n’a pour objet que d’obtenir une nourriture pour les bestiaux ; il ne faut alors qu’un simple labour, semer, herser, pour, dans l’espace de deux mois et demi, changer les terrains grêlés en prairies. Il faut étudier les espèces de grains qui conviennent le mieux à la qualité du sol, et surtout celles dont il sera le plus facile de s’approvisionner : telles sont l’orge, l’avoine, le seigle et les semences légumineuses, connues sous le nom collectif de dragées, de grenailles et de bisailles, principalement la vesce hâtive, ou petite vesce, grain qui peut se semer avec l’avoine à la fin de juillet. Ces prairies fauchées à l’époque de la fleuraison, fourniroient un fourrage excellent, qu’on pourroit faire faner et conserver pour la nourriture de l’hiver ; mais il vaudroit mieux toutefois, si la saison le permettoit, attendre que le grain fût formé, et le faire servir de semence dans les terres qui auroient été ravagées par la grêle à une époque très-voisine de la maturité. Il ne s’agiroit alors que de labourer légèrement pour enfouir la semence, et de herser. Le hersage et le labourage sont des opérations essentielles après une grêle ; elles servent à remuer une terre qui a été battue à sa surface, et à rétablir à la superficie la terre végétale que cette eau congelée a plus ou moins refroidie.

Si les pois, les fèves, les vesces et leurs différens mélanges, sont couchés contre terre par la grêle, et qu’elle ait froissé la plupart de leurs tiges, il est très-difficile alors de tirer parti de ces plantes et d’en faire un fourrage de bonne qualité : ce seroit en vain qu’on compteroit sur une nouvelle végétation, elle ne sauroit être d’imparfaite dans ce moment. M. Yvart croit qu’il est préférable de les enfouir à la charrue, et on est amplement dédommagé de ce léger sacrifice par l’engrais abondant que cette opération procure. Les terres traitées ainsi sont ensemencées à l’automne et ne reçoivent point de fumier. Cette méthode d’engraisser les terres par l’enfouissement des plantes, est trop peu pratiquée. Il seroit bien à souhaiter qu’elle devînt plus générale dans les cantons sur tout où le transport des engrais est coûteux et difficile.

On a quelquefois essayé d’abandonner à eux-mêmes des grains qui s’étoient ainsi naturellement ressemés, pour en obtenir une récolte l’année suivante ; mais cette méthode, qui réussit communément pour l’orge, a rarement du succès pour le seigle et pour le blé : on en a eu la preuve par des expériences faites dans les années précédentes. Cependant plusieurs anciens cultivateurs se souviennent d’avoir vu, dans une calamités à peu près semblable, mettre en usage cette pratique avec avantage. Quand la saison est avancée, que les épis de seigle et de froment sont totalement battus par la grêle et que le grain est répandu également sur la terre, on pourroit alors faire couper et ramasser la paille qui, dans les cantons grêlés, est ordinairement rare et chère. On herse avec des herses de fer, et on laboure légèrement suivant la nature du sol ; dans un fonds sablonneux, le grain donne avant l’hiver un fourrage sain et abondant.

La germination et la végétation sont, dans les terres fortes, plus lentes que dans les fonds secs et légers : on pourroit attendre l’époque des semailles pour cette opération ; et quand bien même, comme l’a judicieusement observé M. Bourgeois, économe de la ferme nationale de Rambouillet, on n’auroit que du fourrage au printemps, les terres n’en seroient pas