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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/188

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Si l’action combinée de ces fléaux a exercé son influence sur des espaces considérables, les cultivateurs savent que, lorsque leur ouvrage, dans des pièces de terre ensemencées en automne, est détruit entièrement par le séjour de l’eau ou par la gelée, il faut, au printemps, y semer d’autres grains dont la végétation s’accomplit en quelques mois.

En 1709, les blés gelèrent. Dans beaucoup de communes on laboura les champs précédemment ensemencés, et on y répandit de l’orge, qui produisit en telle abondance, qu’on souffrit peu de la perte des blés.

Certains terrains, trop battus par l’eau, doivent être labourés de nouveau, plus ou moins superficiellement ; un hersage préparatoire est nécessaire à d’autres ; et, dans d’autres, on peut se contenter de semer et de herser après.

Mais il arrive plus ordinairement que l’inondation et la gelée ne maltraitent que des portions de champs.

Si ces portions sont peu considérables, on peut réparer promptement le mal, en employant une pratique rarement usitée en France, mais dont le succès est assuré. C’est ici que nous ne pouvons nous dispenser de donner des détails.

On prendra des touffes de froment, de seigle ou d’escourgeon, qu’on voudra repiquer ; on les lèvera avec soin, et on les préservera de la sécheresse.

On les séparera en plusieurs brins, laissant à chacun des racines.

On plantera ces brins à la distance de trois à six pouces les uns des autres, suivant l’ébat des plants et la qualité des terres.

Les trous auront environ trois pouces de profondeur.

On se servira d’un plantoir ou d’une cheville ordinaire, comme pour repiquer des légumes, ou, ce qui vaudra beaucoup mieux, d’un plantoir à plusieurs branches qui seront écartées convenablement et assujetties par une traverse dans laquelle on fixera un manche. Avec ce dernier instrument on fait plusieurs trous à la fois.

Avant de planter on remuera la terre, s’il en est besoin, avec les instrumens du pays les plus expéditifs.

Lorsque le temps est sec, il faut choisir l’après-midi pour cette opération : le matin convient également, si le ciel est disposé à la pluie, ou le temps couvert.

Quelques sarclages qu’on fera dans la suite rendront la végétation plus vigoureuse.

L’avantage de cette manière de réparer les pertes partielles des grains, c’est que ce qui est repiqué mûrit aussi promptement que les parties semées en automne, qui ont résisté à l’inondation et à la gelée, en sorte que tout le champ peut être récolté en même temps.

Lorsque les dégâts, sans être immenses, occupent des espaces très-étendus, lorsqu’ils n’ont pas eu lieu par petites places, mais dans des portions continues du même terrain, il est utile de planter à la charrue, opération prompte et facile. Dans ce cas, on doit labourer en faisant des sillons qui n’aient que quatre pouces de profondeur.

Des cultivateurs, hommes, femmes ou enfans, suivent la charrue et posent les plants à la manière dont on repique le colza dans beaucoup de pays.

De toutes les plantes qu’on peut repiquer au printemps, le seigle est celle qui reprend le mieux, parce qu’il a une végétation plus forte et plus accélérée. Dans toute autre circonstance, il est démontré que le repiquage ne sauroit être avantageux. (Voyez Blé, plantage.)

Manière dont se doivent conduire les propriétaires dans les prairies qui ont été inondées. Les rivières, en débordant, déposent sur les prés, et par des alluvions subites, des limons plus