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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/207

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» ont augmenté leur revenu de 9000 livres, réparties entr’eux ; ils ont diminué celui du cardinal de 12.000 liv. de rente.

» Ainsi, en détruisant sa garenne de Gaillon, le cardinal de la Rochefoucauld a échangé 13.000 livres de revenu produit par la garenne contre 1000 liv. de revenu produit par une dîme recueillie sur la terre où il exerçoit un droit de garenne très-lucratif. Le cardinal s’est dépouillé de 12.000 l. de revenu. Il a fait présent aux cultivateurs qui entouroient sa garenne, d’un revenu de 9000 liv. réparti entre eux, et produit par la récolte qu’ils ont levée, et qui n’a point été mangée par les lapins.

» Dans ce calcul, il y a eu 3000 liv. de revenu de perdues pour toutes les parties, puisque 13.000 liv. de revenu en chair de lapin ont été remplacées par 10.000 liv. en grains récoltés.

» La partie des subsistances en France a fait une perte plus considérable.

» Le fermier de a garenne, qui payoit 13.000 liv. au cardinal de la Rochefoucauld, en retiroit au moins 18.000 liv.

» La destruction de cette garenne a privé le château de Gaillon de ces 18.000 liv. en écus, produites par la vente de la chair des lapins ; 13.000 l étoient données au cardinal, et 5000 l. retenues par le fermier, ou perçues par ceux qu'il employoit à faire valoir la ferme de la garenne[1].

» En échange de cette quantité de chair de lapin, qu’on n’a plus ramassée dans cette garenne, des cultivateurs ont fait une récolte en grains de 10.000 liv., partagées entr’eux et le cardinal. Il y a eu un déficit de 8000 l.

» Dix-huit mille livres d’argent ont dû être produites par la vente de 20.000 lapins. Cette garenne fournissoit, aux travaux de l’industrie, 20.000 peaux de lapins.

» Ceux qui achetoient les lapins et qui les consommoient retiroient de la vente de ces peaux, à 5 sous l’une dans l’autre, 5000 liv.

» Les lapins de la garenne de Gaillon fournissoient donc, par an, aux travaux de l’industrie, pour 5000 liv. de peaux de lapins et de poil, et pour 13.000 liv. de chair bonne à manger. »

Il n’est pas inutile de remarquer que les lapins abandonnés à eux-mêmes, dans les lieux ouverts, pouvant vivre et courir à leur gré, respirant l’air de la liberté et n’éprouvant aucune gêne, donnent un aliment plus délicat et plus sain que ceux que l’on renferme dans des enclos où leurs mouvemens sont contraints. Ces lapins, entièrement sauvages, ont plus de vivacité et d’agilité que les autres ; la physionomie plus éveillée, le corps moins épais, la tête moins grosse, plus allongée et presque ronde ; on les distingue encore des lapins de clapier, à leur poil moins fourni et plus roux, à leurs ongles plus forts et plus pointus, et sur-tout à la teinte rousse

  1. « M. l’abbé Rozier prétend dans son Dictionnaire d’Agriculture, que dix lapins mangent plus qu’une vache, dans une année. Cela est impossible ; les animaux mangent en proportion de leur grosseur et de leur poids. Comme il n’y en a aucune entre le poids et la proportion de dix lapins et une vache, l’idée ridicule de M. l’abbé Rozier a été avancée de sa part sans aucune réflexion. »
    » Tout ce que M. l’abbé Rozier dit de ce quadrupède, ne paroît pas dicté par un observateur éclairé… (Je supprime ici la suite de cette phrase, qui porte tous les caractères de la dureté et de l’injustice.)
    » Le lapin ne vit pas seulement de la tige qui produit le grain, il mange une infinité d’autres plantes qu’on ne récolte point, et dont lui seul met à profit la récolte. Ces plantes, inutiles aux cultivateurs, sont converties, par la chair et la peau du lapin, en une substance utile, aux besoins de la société. »