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vée pour les arbres forestier, principalement ceux d’alignement, et en général tous ceux desquels on attend une longue durée, une résistance contre les vents impétueux, et la plus belle venue.

Ce qui vient d’être dit indique le meilleur moyen à employer pour envoyer des graines d’arbres des pays lointains. C’est de les stratifier avec de la terre ou de la mousse à peine humide, de les mettre dans des caisses de bois. Ces graines peuvent ainsi traverser les mers, éprouver une grande variété de température, et conserver leur faculté germinative pendant plusieurs années, tandis que, si elles eussent été simplement mises dans des sacs, elles l’eussent perdue au bout de quelques semaines.

Humbold a proposé de faire tremper les graines qui ont perdu leur faculté germinative par vétusté, dans une eau chargée d’acide muriatique oxigéné, pour les ramener à leur état primitif. Il explique ce fait par l’irritabilité qui est rappelée en elles par l’action de cet acide.

On peut conclure des observations précédentes, qu’il est possible de garder les graines des arbres indigènes qui n’en fournissent pas toutes les années, tels que le chêne, le hêtre, etc., en les enfouissant profondément, à cinq ou six pieds, par exemple, en grande masse, dans un terrain sec. On fait encore peu usage de ce moyen, parce qu’on n’y est pas invité par le besoin ; mais, si les pépinières forestières prennent, comme on doit l’espérer, toute l’extension dont elles sont susceptibles, il deviendra indispensable d’y avoir recours.

Il est trois manières de semer usitées dans les pépinières, savoir, à la volée, en rayon, et au plantoir. Les deux premières se pratiquent principalement pour les graines fines, telles que celles d’orme, de bouleau, etc. ; l’autre ne peut s’employer que pour les graines d’une certaine grosseur, telles que les glands, les noix, etc. Il n’y a pas de doute que cette dernière ne soit la meilleure, en ce que les plants qui en résultent, étant également espacés, jouissent tous du bénéfice de l’air, et ne se nuisent pas réciproquement par leurs racines ; mais très-souvent les avantages qui en résultent sont si peu sensibles, qu’ils ne valent pas l’emploi du temps qu’on leur a sacrifié. Il faut donc se borner à n’en faire usage que dans les semis des très-grosses semences ou d’espèces rares. Quant au choix entre les deux premières, il est assez difficile de le déterminer. Les pépiniéristes varient beaucoup d’opinion à cet égard : elles ont chacune des avantages et des inconvéniens. On peut leur appliquer la même observation que ci-dessus, c’est-à-dire que la différence qu’elles présentent dans leurs produits est trop peu marquée, pour mériter une préférence à l’une plutôt qu’à l’autre. La première est celle de la nature, aussi est-ce celle que j’aime le mieux employer, quoique la difficulté, qui consiste à répandre également la semence sur toute la surface du terrain, ne soit pas toujours facile à vaincre. Ce n’est que par une grande pratique qu’on peut espérer d’y parvenir. Il faut, de plus, avoir sur-tout attention de ne pas semer trop épais, parce qu’une portion du plant étoufferoit l’antre, et que ce qui resteroit viendroit moins beau.

La semence répandue sur le terrain doit être recouverte plus ou moins de terre, selon son espèce, par le moyen du râteau. Il seroit bon, en général, qu’elle le fût en terre plus meuble et plus substantielle que celle du sol ; c’est-à-dire avec une terre passée à la claie et préparée avec des détritus de végétaux, comme on le fait dans les pépinières d’arbres étrangers ; mais la dépense que cela occasionneroit s’y oppose presque toujours.

L’air est indispensable à la germination des plantes, ainsi que beaucoup de physiciens l’ont prouvé par des expériences directes. En conséquence, toute graine enfouie trop profondément ne se développe point et pourrit au bout d’un laps de temps plus ou moins considérable, suivant sa nature et celle du terrain où elle se trouve. Il faut donc qu’un pépiniériste ne couvre les graines qu’il sème, que de la quantité de terre strictement nécessaire au besoin qu’elles ont d’humidité. Chaque espèce de graines demande un degré d’enfouissement différent. En général, elles doivent être d’autant plus près de la surface qu’elles sont plus fines ; cependant quelques grosses espèces, le gland, par exemple, ne réussissent pas, si elles ont plus d’un pouce de terre au dessus d’elles. Celles qui demandent à être enterrées plus profondément sont les osseuses, comme les noix, les amandes, les aubépines, les nèfles, les sorbes, les cornouilles, les olives, etc., dont le germe a besoin d’un haut degré d’humidité, pour pouvoir écarter les battans de la boîte dans laquelle il est renfermé. Il faut même à la plupart de ces dernières, surtout lorsqu’elles n’ont pas été semées immédiatement après leur récolte, deux et quelquefois trois ans de séjour dans la terre, pour qu’elles puissent se développer. Ce sont celles-là principalement qu’il est utile de mettre au fermoir, c’est-à-dire d’enfouir, en masse, dans un terrain sec ou dans une cave, puisqu’on est presque certain qu’elles ne lèveront pas la première