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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/423

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les frappant de stupeur, à l’aide du feu endant la nuit, ou du leurre pendant le jour.

La chasse au fusil a un grand attrait pour les chasseurs de profession, et ils attachent quelque gloire et quelque mérite à son succès. Il est de principe, en fait de chasse, de ne tirer aux perdreaux que quand ils sont maillés ; cette époque commence pour eux à la mi-août. En général, pour chasser au fusil, il faut être accompagné d’un bon chien d’arrêt. Les heures convenables sont, dans l’automne, depuis dix heures jusqu’à midi, et depuis deux jusqu’à quatre. Dans tout autre moment, il n’est ni facile, ni commode, de courir après les perdrix, qui sont dispersées pour chercher leur nourriture. Un chien bien dressé enveloppe et rassemble les perdrix, en les circonvenant, et décrivant autour de la bande une spirale qui, se resserrant toujours, réunit et cerne le gibier en un seul tas. C’est alors que le chasseur avance à une distance convenable et tire les perdrix, soit arrêtées à l’endroit qu’indique le chien de ses yeux et de son museau, soit lorsqu’elles prennent leur vol. Il entre dans les bonnes qualités du chien, de ne pas poursuivre les perdrix envolées, pour ne pas les forcer à trop s’écarter. (Voyez l’article Chasse.)

À défaut de chien, on peut attirer les perdrix avec l’appeau, ou les attendre dans la hutte ambulante, lorsqu’elles quittent les vignes et les bois où elles ne couchent jamais, pour gagner quelque pelouse ou friche qu’on sait être leur cantonnement. Si on habite un pays peu abondant en perdrix, il faut chercher à s’assurer des lieux où elles remisent, avant de s’exposer à les quêter à l’aventure. Pour cela, on se rend un soir à la chute du jour dans les plaines ; et, appuyé contre un arbre, une haie ou un buisson, on écoute avec attention de quel côté vient le chant que ces oiseaux, en se rassemblant, ne manquent jamais de faire entendre. Ce chant est toujours suivi d’un vol, comme si quelque instinct les avertissoit de quitter le lieu où elles viennent de se faire remarquer. Cette habitude, ou, si l’on veut, cette précaution, est constante et uniforme, et on peut être certain que sans quelque accident, les perdrix passeront la nuit là où elles se seront posées. Si le chasseur est bien servi par ses oreilles et par ses yeux, il est donc sûr de retrouver son gibier. Il remarque avec soin les lieux, et le lendemain, avant le jour, il s’y rend avec un chien attaché, s’il n’est pas très-sage. À la première lueur de l’aube, il entendra ses perdrix recommencer leur chant, après lequel elles feront un vol plus ou moins long ; quelquefois elles répètent encore ce manège du chant et du vol, ce qui conduit jusqu’au moment du lever du soleil ; dès lors le chasseur peut mettre son chien et quête, et il ne tardera pas d’avoir occasion d’exercer son adresse.

La neige est funeste aux perdrix de bien des manières ; elle les rend surtout bien faciles à tirer par le tranchant de leur couleur, qui se détache sur le voile blanc dont la plaine est couverte ; aussi les nuits de neige et de lune sont-elles l’espoir du braconnier. Il se revêt d’une chemise blanche par-dessus ses habits, se coiffe d’un bonnet blanc ; et, parcourant les champs, approche les perdrix, blotties et immobiles, d’aussi près qu’il le veut. Un seul coup de fusil est très-meurtrier dans cette circonstance, et abat presque toute une compagnie.

Comme il naît et vit plus de perdreaux mâles que de femelles, et que la multiplication des mâles nuit à celle de l’espèce par leur acharnement à poursuivre les couveuses au temps de la pariade, c’est un soin conservateur que celui de