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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/436

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parties d’ossemens humains qu’ils tenoient sur leur poitrine comme une espèce de trophée dont ils ne se dessaisirent qu’avec difficulté, témoignant qu’ils y attachoient beaucoup de prix.

» Leurs lignes pour pêcher avoient été cordées à deux brins ; mais leurs filets étoient faits avec les feuilles de la plante divisées par lanières, sans autre préparation. Sans doute, comme ces filets sont d’une prodigieuse étendue pour pêcher au large à une bonne distance de la côte, ces sauvages négligent de faire des cordes pour cet usage, parce qu’ils y emploiroient bien du temps, et que d’ailleurs ils trouvent ainsi l’emploi de leur lin assez sûr ; car ils vivent en grande partie du produit de leur pêche. »

D’après tous ces faits, le phormium textile paroît fournir les meilleures fibres végétales connues pour faire des cordes et des tissus. Cette vérité fut annoncée, pour la première fois, par le célèbre capitaine Cook et son illustre compagnon de voyage sir Joseph Bank’s. Labillardière vient de la démontrer par une suite d’expériences aussi ingénieuses qu’elles sont exactes et concluantes. (Voyez son Mémoire, imprimé dans les Annales du Muséum, second volume, page 474.)

Culture. Nous n’avons point encore d’expériences en grand, faites en Europe, qui puissent nous diriger dans la culture de cette plante en rase campagne. Mais nous possédons quelques données qui peuvent nous mettre sur la voie pour y parvenir avec quelques degrés de certitude. Nous allons les extraire d’un Mémoire que nous avons publié dans les Annales du Muséum national d’Histoire naturelle, volume II, page 228, et nous y ajouterons quelques faits qui n’existoient pas alors.

D’abord, la Nouvelle-Zélande étant située entre le trente-quatre et le trente-septième degré, vers le pole antarctique, offre à peu près la même latitude que plusieurs parties de la France. Elle doit être même beaucoup plus froide, parce que le pole dont elle est voisine présente une région glacée, plus étendue que celle du pole arctique, puisqu’on est allé vers celui-ci jusqu’au soixante-dixième degré, tandis que les voyageurs ont été arrêtés par des montagnes de glace dès le soixantième du pôle sud. Il résulte de cette position que les îles de la Nouvelle-Zélande doivent être plus froides que la France pendant leur hiver, et plus chaudes pendant leur été ; que de plus, la température de ce climat doit être variable, parce que toutes les fois que les vents viennent du pole, ils doivent porter, même au milieu de l’été, le froid dont ils se sont chargés en passant sur les montagnes de glace qu’ils ont parcourues ; et que lorsqu’ils soufflent de l’équateur, il en doit résulter une chaleur semblable à celle qu’éprouve la côte de Barbarie située à la même latitude à peu près. En raison de cette variation du climat, les végétaux qui l’habitent doivent être doués d’une grande étendue de facultés, soit pour résister au froid, soit pour supporter la chaleur. Une expérience fortuite, dont les détails ne peuvent être regardés ici comme un hors-d’œuvre, pourra nous en donner, sinon une preuve, au moins une forte présomption.

Le pied de phormium textile, envoyé au Muséum, par M. Aiton, en nivose de l’an 8, se trouvant dépourvu de racines fibreuses, et ayant beaucoup souffert dans la traversée d’Angleterre ici, par une température froide et très-humide, fut placé dans une serre chaude, sur une couche de tan neuf. Un fourneau établi au dessous de la couche, ayant été chauffé tous les jours pendant ce mois, fit monter graduellement la chaleur de cette couche, dans l’une de ses parties, jusqu’à quarante-sept degrés au dessus de zéro du thermomètre de