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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/460

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PLANTES propres à la nourriture des bestiaux. Cet article étant destiné à faire connoître aux cultivateurs les plantes qui doivent être propagées et multipliées dans les prairies, soit naturelles, soit artificielles, ainsi que dans les pâturages, nous ne nous bornerons pas seulement à désigner celles qui sont les plus saines, les plus nutritives, qui sont recherchées avec le plus d’empressement par les animaux domestiques, mais nous indiquerons aussi celles qui leur sont nuisibles ou indifférentes, et celles enfin qu’ils dédaignent, ou dont ils ne se nourrissent que dans de certaines circonstances. La science agricole, ainsi que toutes les connoissances à la portée de l’esprit humain, ne se perfectionnent que graduellement, et à raison de ce que la civilisation augmente parmi les peuples. Le sauvage se contente des fruits qui naissent spontanément ; les hordes à demi-barbares errent dans les déserts avec leurs troupeaux, et se nourrissent de leurs produits ; les peuples parvenus à un certain degré d’industrie se livrent à la culture des plantes que la nature produit sur le sol qu’ils habitent ; ils inventent des instrumens propres à alléger et à expédier leurs travaux ; ils domptent les animaux pour les faire servir à leurs besoins. Mais tous ces moyens, ainsi que les différentes méthodes d’agriculture, ne peuvent arriver à un haut degré de perfection que chez les peuples qui cultivent les sciences exactes, et qui leur ont fait faire de certains progrès.

Le cultivateur qui ignore les premiers principes de botanique, de chimie, de minéralogie, etc., pourra faire produire à son champ une récolte plus ou moins abondante, en suivant les méthodes routinières qu’il a reçues de ses ancêtres ; mais il sera incapable de perfectionner son art ; et il ne retirera jamais de sa culture les bénéfices qu’il a droit d’en attendre, s’il ne porte dans son exploitation un plus haut degré de connoissance, de réflexion et d’esprit de calcul.

Il est donc d’un intérêt majeur d’appeler l’attention sur un objet qui forme la base de toute bonne agriculture. Il faut convaincre les agriculteurs que les prairies sont indispensables pour l’éducation et la nourriture des bestiaux, puisque, sans bestiaux, on ne peut se procurer une quantité suffisante d’engrais, et que, sans engrais, les terres s’épuisent, et ne produisent que de foibles et chétives récoltes. Les principes qui ont été appréciés par les bons agriculteurs de tous les pays et de tous les âges semblent être totalement inconnus à la majeure partie des hommes qui se livrent par état à la culture des terres. On les voit en effet se donner beaucoup de soins, et exécuter de pénibles travaux pour bonifier des champs en labour, tandis qu’ils abandonnent presque à la nature le succès des plantes fourragères. Ils ne réfléchissent pas qu’avec beaucoup moins de dépenses et de fatigues ils obtiendroient de plus grands bénéfices, s’ils daignoient s’occuper d’une partie de l’économie rurale qui sert de fondement à toutes les autres. Nous ne craignons pas d’avancer qu’il est indispensable, dans une exploitation rurale, de commencer par l’amélioration des terres propres aux prairies et aux pâturages, avant de s’appliquer sérieusement à celle des terres labourables.

La nature a réparti ses bienfaits sur tous les points du globe, mais avec plus ou moins d’abondance dans un lieu que dans l’autre. Les végétaux destinés à la nourriture de l’homme, et à celle des bestiaux, couvrent en effet la surface de la terre. Les uns paroissent destinés exclusivement à certains climats ou à certaines localités ; les autres sont répandus sur des espaces moins déterminés ; on en trouve qui, étant appropriés au