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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/488

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PLÂTRE, GYPSE, SÉLÉNITE, ou SULFATE DE CHAUX. On donne ces différens noms à une substance fossile, qui est une combinaison de terre calcaire avec l’acide sulfurique. Elle a la propriété de se dissoudre dans une grande quantité d’eau ; c’est par cette raison que les eaux qui filtrent à travers les terrains gypseux sont malsaines, et peu propres aux usages économiques.

On trouve le plâtre sous différentes formes, et nuancé de différentes couleurs. Il est ordinairement disposé par couches, et présente l’aspect d’une substance pierreuse, parsemée de petits cristaux brillans, et dont les parties peuvent être facilement divisées avec un instrument de fer. Sa couleur la plus commune est d’un blanc tirant sur le gris ; les nuances rouges, bleues, jaunes, et dont il est souvent coloré, sont dues à l’oxide de fer.

Si on l’expose à l’action du feu, il perd son eau de cristallisation ; il décrépite lorsqu’on le chauffe brusquement, et devient d’un blanc mat, et d’une friabilité considérable. C’est dans cet état qu’il est propre aux constructions et aux ouvrages d’ornement.

Les expériences qui ont été faites dans ces derniers temps, et les résultats avantageux qu’on a obtenus, démontrent que cette substance doit être regardée comme un des agens les plus actifs de la végétation. Ses propriétés étoient peu connues à l’époque où Rozier a entrepris son Cours d’Agriculture. On verra, en consultant l’article Gypse, qu’il a donné peu de notions sur cette matière. Il est donc important d’entrer dans quelques détails sur les avantages qu’on peut en retirer, et sur la manière d’en faire usage.

Nous considérons ici le plâtre sous deux rapports, comme une substance propre à la construction des édifices, et comme un moyen de fertiliser les terres et d’augmenter les produits de la culture. Nous donnerons la description d’un moulin à broyer le plâtre, tel que nous l’avons vu employé dans la Catalogne et dans le royaume de Valence.

On a senti depuis longtemps tous les inconvéniens de la méthode de pulvériser le plâtre employé à Paris et aux environs de cette capitale. Lorsque le plâtre est cuit, on en répand sur le sol une petite quantité, que des ouvriers frappent avec de gros bâtons, jusqu’à ce qu’ils l’aient réduit en poudre. Il en résulte une grande perte de temps, une augmentation de main-d’œuvre, et, par conséquent, une cherté plus grande dans la matière. On conçoit, en effet, quelle lenteur apporte dans l’exécution un moyen aussi imparfait, et qui doit son origine à ceux de nos ancêtres qui, les premiers, imaginèrent d’employer le plâtre dans la construction de leurs chaumières. On fait aussi usage à Paris d’une autre méthode non moins barbare que la précédente, et qui devroit être proscrite en bonne police. Les ouvriers répandent dans les rues le plâtre, afin de le faire broyer par les roues des voitures, ou par les pieds des chevaux. Les Parisiens, qui sont accoutumés à marcher habituellement dans l’ordure et la crotte, ne font pas attention à ce genre de malpropreté : mais il ne seroit pas toléré dans les villes de l’Angleterre et de Hollande ou l’on a quelque respect pour le publique.

Tous ces inconvéniens sont peu considérables, si on les compare avec ceux qui résultent de cette méthode pour la santé des ouvriers. La poussière qui s’élève par l’effet du battage, entre continuellement dans les poumons, et leur occasionne des maladies qui altèrent leur constitution, et abrègent le cours de leur vie. D’ailleurs, l’attitude courbée dans laquelle ils doivent être, pour exécuter ce travail, est pénible et contraire à la santé.