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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/58

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mensions, et à en fortifier les bords, précaution bien nécessaire, sur-tout dans les filets qu’on tend et qu’on traîne, comme pantières, tirasses, sennes, etc.

Enlarmer un filet, c’est jeter et attacher sur ses bords des espèces de grandes anses de corde ou de cordonnet, d’une force proportionnée à l’usage de cette enlarrnure, qui sert communément à recevoir des cordes plus fortes ou des bâtons, comme dans des filets de pêche et dans ceux à alouettes.

On monte un filet, quand on le garnit de tout ce qui est nécessaire au service qu’on en attend. Si on a deux ou plusieurs filets pareils qu’on veuille faire servir d’une seule pièce, on les coud en joignant les unes aux autres, par une ficelle, les mailles des deux lisières semblables, reprochées côte à côte.

Les filets de pêche qui doivent garder dans l’eau une situation verticale, sont garnis par le haut, qu’on appelle l’arête du filet, de matières légères ; pour l’ordinaire, ce sont des morceaux de liége percés et passés dans une corde qu’on attache au filet. C’est ce qu’on nomme les flottes. Elles doivent être en proportion de l’étendue et du poids du filet. On emploie au même usage de petites planches de bois léger, tels que le sapin, le tremble, le tilleul. En Allemagne, on a reconnu que l’écorce du vieux peuplier avoit tous les avantages du liége pour la flottaison, et comme elle est d’ailleurs sans autre valeur, l’économie semble en conseiller l’usage. Pour que le bas ou le pied tombe au fond, on y attache, au contraire, des matières lourdes. Ce lest s’appelle la plombée, parce que l’on se sert d’ordinaire de chapelets de balles de plomb, percées et enfilées sur une corde, ou d’espèces de tuyaux cylindriques de ce même métal, coulés exprès pour cela dans une pierre tendre qu’on peut façonner soi-même pour servir de moule. Lorsqu’on coule le plomb, on tient, au milieu du moule, une broche de fer qui sert d’ame, et autour de laquelle se forme le tube cylindrique. On la retire aisément quand le métal est refroidi, surtout si on a soin de faire que cette broche aille un peu en diminuant. Quelques uns, au lieu de plomb, mettent au bas de leurs filets des pierres ou des anneaux de fer.

Les soins que demande la conservation des filets intéressent en quelque sorte davantage leur propriétaire, que la connoissance de leur fabrication. Les filets fatiguent beaucoup, et ce n’est qu’avec des précautions qu’on peut prolonger leur durée. La première de toutes est de les avoir tannés. En se procurant du tan et le faisant bouillir dans l’eau pour y plonger ses filets, on leur donne cet apprêt qui est reconnu propre à les conserver. Les proportions de l’eau au tan doivent être de deux parties et demie contre une ; c’est-à-dire, deux mesures et demie d’eau contre la même capacité pleine de tan. Quand l’eau s’en est suffisamment chargée par une ébullition qui, dans les grandes fabriques, dure jusqu’à dix-huit heures, on retire tout le tan avec un instrument propre à le puiser, et on jette les filets dans l’eau bouillante. Après qu’ils sont imbibés on les fait sécher, en les préservant de la pluie et de la gelée. Les filets de pêche ainsi préparés, résistent à l’eau et y restent des temps considérables sans s’endommager. Outre l’écorce du jeune chêne, celles du saule, du noyer, des sumacs, de l’aulne, ainsi que les bruyères et plusieurs autres végétaux, fournissent aussi du tan.

Le meilleur est celui du chêne : à son défaut, sur-tout pour les filets de chasse, on peut se servir d’une préparation de teinture, et tirée du noyer, qui consiste à lever les écorces de ses racines et à les faire bouillir dans l’eau à la proportion de deux boisseaux d’écorce contre deux seaux d’eau. Après que ce mélange a bouilli une heure, on y plonge et re-