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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/588

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tionnement de l’agriculture, à l’abondance des produits et à la conservation des propriétés productives des terres. Nous terminerons cet article par quelques indications sur la profondeur à laquelle doivent être enterrées les diverses espèces de graines que l’on sème.

Si l’on observe les moyens qu’emploie la nature pour la reproduction et la multiplication des végétaux par la voie des semences, on verra qu’elle est aussi simple dans ses procédés que ceux-ci sont vastes et assurés : c’est en les imitant autant que le permettent les localités dans lesquelles on se rencontre, et en les suppléant, autant qu’il est possible, qu’on peut espérer de réussir.

Dans l’état de nature, les graines mûrissent sur les végétaux qui les produisent ; quelques unes tombent immédiatement après leur maturité ; d’autres, au contraire, restent sur leur pédoncule, jusqu’à l’époque d’une nouvelle sève qui, trouvant oblitérés les vaisseaux qui conduisent à ces graines mûres, s’en détournent pour se porter vers des boutons ou des rameaux qui exigent son fruit vivifiant ; mais les uns et les autres tombent à terre sur des couches d’humus végétal produites par la décomposition des feuilles, des brindilles et autres parties de végétaux ; d’autres trouvent pour lits, des couches de plantes herbacées, dans lesquelles elles se trouvent enveloppées et couvertes ; il en est qui ne rencontrent dans leur chute que de légères couches de mousse, de lichen et autres plantes cryptogames de petite stature ; bientôt elles sont recouvertes par des particules terreuses qu’y charrient les vents ou qu’y entraînent les pluies, et par les feuilles desséchées des végétaux supérieurs. Les fruits pulpeux tombent entiers, leur chair se décompose, les siliques, les calices et autres espèces d’enveloppes exposées à l’humidité, se détruisent ; il résulte, de la décomposition de toutes ces substances, un humus végétal, dans lequel se rencontre une très-grande quantité de carbone, dans un état de division tel, qu’il est propre à entrer presque sur-le-champ dans l’organisation végétale.

Ainsi donc, les germes des semences, après avoir été développés par l’humidité et la chaleur, se nourrissent d’abord du lait végétal contenu dans les lobes qui les accompagnent ; leurs radicules s’enfoncent ensuite dans une couche presque uniquement composée d’humus végétatif, dans laquelle elles tirent, par leurs suçoirs, un aliment moins élaboré, mais plus substantiel que celui fourni par les lobes des semences, et plus analogue à l’état de la jeune plantule : peu de temps après, le jeune plant devenant plus robuste, enfonce ses racines en terre à une plus grande profondeur ; il y trouve des sucs élaborés, plus nutritifs, plus forts et plus assimilés à l’état de vigueur et de force des végétaux à cette époque de leur âge.

On voit qu’il existe une grande analogie entre les végétaux et les animaux, pour la manière dont ils se nourrissent.

Ceux-ci, en naissant, vivent presque uniquement du lait de leur mère ; il leur faut ensuite une nourriture plus succulente ; et enfin, arrivés à leur état parfait, ils ont besoin d’alimens plus substantiels, plus forts, et qui conviennent mieux à leur tempérament vigoureux et robuste.

D’après ce qui vient d’être dit, il est aisé de sentir 1°. que la couche de terre dans laquelle se font les semis doit être abondante en parties nutritives, et dans un état d’élaboration tel, qu’elles puissent remplacer l’aliment que fournissent aux jeunes semis leurs cotylédons, et servir de nourriture intermédiaire entre ce premier et celui qu’ils doivent tirer des couches de terre inférieures ; 2°. que cette couche de terre doit être très-meuble, pour que les radicules et le tendre chevelu des racines des jeunes plants puissent la pénétrer et y chercher leur nourriture ; 3°. et enfin, que la couche de terre qui doit recouvrir les semences doit avoir peu d’épaisseur, être meuble et légère, pour que les pulpes des semences puissent aisément la traverser lors de leurs développemens.

Si l’on ne recouvroit les semis qui se font à mains d’hommes qu’aussi peu que ceux qui se font naturellement dans les campagnes, on manqueroit son but, on réussiroit rarement à faire lever les graines que l’on sèmeroit. Les semis qui se font naturellement, sont abrités par des herbages ou des arbres, dont la fraîcheur et l’ombrage léger protègent la germination des graines, et les défendent des rayons trop ardens du soleil. Les semis faits à mains d’hommes, se pratiquant dans une terre nue, nouvellement remuée et exposée aux rayons du soleil, n’auroient ni assez d’humidité ni assez d’abri pour lever : on est donc obligé de les couvrir davantage, et il est une règle assez généralement suivie, qui, à quelques exceptions près, peut guider dans la pratique : c’est la grosseur des semences qui doit indiquer, à peu près, l’épaisseur de la couche de terre qui doit les recevoir, pour faciliter et assurer leur germination.