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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/667

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digne d’occuper leurs loisirs, ils l’ont regardé comme un exercice salutaire et l’amusement le plus noble ; ils l’ont entouré d’un grand appareil, ils y on attaché des charges qui flattent l’ambition des courtisans, et ils ont voulu qu’il y régnât une étiquette, une sorte de cérémonial ; en un mot, la vénerie d’un souverain, c’est-à-dire la grande direction de ses chasses, est un objet important, un corps honorable qui fait partie de la cour et de la splendeur du trône.

Des hommes de toutes les classes, des meutes nombreuses, une grande quantité de chevaux, un attirail considérable composent la vénerie des grands. Mais c’est un faste qui leur est réservé et auquel d’autres ne peuvent atteindre. Ce seroit donc un travail superflu et même hors de toute convenance, que de donner, dans cet Ouvrage, les règles et tous les détails d’une vénerie montée de manière à faire partie de la maison d’un prince. Assez d’autres livres offrent ce pompeux étalage ; et celui-ci, qui est consacré uniquement aux objets utiles, ne doit point être surchargé d’accessoires brillans, qui n’intéressent qu’un très-petit nombre de personnes trop au dessus de la classe commune.

Cependant la chasse aux bois est un exercice également utile et agréable, qui convient aux riches propriétaires des campagnes, à ceux même qui n’ont que de l’aisance. L’équipage se règle sur la fortune, et l’on peut espérer de se procurer du gibier et de l’amusement avec un petit nombre de chiens courans, et même avec un seul. Le choix des chiens, la meilleure méthode de les élever, de les nourrir, de les loger, de les dresser et de les conduire à la chasse des diverses espèces d’animaux des forêts, sont autant d’objets qui ont quelque intérêt aux yeux de la plupart des propriétaires, et qui doivent compléter la partie des chasses que j’ai développée dans cet Ouvrage. Abandonnant ainsi tout ce qui tient à la haute vénerie, que l’on appelle aussi chasse à cors et à cris, et chasse royale, la restreignant, d’une part, et l’étendant de l’autre aux chasses qui passent pour en être distinctes ; je traiterai rapidement de ce qui peut assurer le succès et l’agrément de ces chasses, et j’en parlerai de manière à en faciliter l’exercice au plus grand nombre.

Des chiens courans. La réussite de la chasse aux bois, de même que de la chasse en plaine, dépend du choix des chiens. J’ai donné, à l’article Chasse, les qualités que doit avoir un bon chien d’arrêt ; voici celles qu’on recherche dans le chien courant : la tête sèche, les naseaux ouverts et gros, les yeux vifs et ardens, les oreilles larges, médiocrement épaisses et tombantes ; les épaules libres et dégagées ; les reins forts et un peu élevés en dos de carpe ; le fouet (c’est ainsi qu’en vénerie on nomme la queue des chiens courans) gros près des reins, s’amincissant jusqu’au bout, et peu chargé de poils ; les cuisses nerveuses et charnues ; le jarret ni trop droit, ni trop courbe, et sur-tout pas attaché trop bas ; la jambe sèche et forte, la hauteur des jambes en proportion avec la hauteur du corps ; le pied petit, les doigts fins et un peu longs ; le poil rude sous le ventre ; enfin, vingt-trois pouces et plus de hauteur.

L’on sent bien que ces signes extérieurs, que l’expérience a montrés comme les indices de la bonté d’un chien, ne doivent pas se prendre d’une manière absolue ; il peut arriver qu’un chien qui les réunit ait de mauvaises qualités, tandis qu’un autre chien, dont les formes n’ont pas une belle apparence, soit néanmoins très-bon. La couleur du poil n’influe nullement sur les qualités des chiens, comme on le croit communément. Les chiens blancs que l’on vante le plus, ne sont pas, en général, meilleurs que les autres, mais il sont plus beaux ; ils ont d’ailleurs un avantage, c’est qu’ils s’aperçoivent de fort loin, au lieu que l’on ne distingue pas aussi aisément ceux dont le poil a une teinte plus sombre. Cet avantage est néanmoins compensé en partie dans les pays où les loups sont communs ; en effet, le chien blanc qui s’écarte, est bientôt remarqué et suivi par le loup, qui ne tarde pas à en faire sa proie.

Les défauts les plus marqués de l’extérieur des chiens courans sont les jambes trop longues, les pieds courts et de gros