Page:Ruskin - Les Pierres de Venise.djvu/158

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pour le talent de l'artiste. L'art religieux utile est tou jours resté et restera toujours entre ces deux extrêmes : d'un côté, la barbare fabrication d'idoles; et de l'autre, les magnifiques productions des grands artistes. Il a consisté en miniatures pour les missels; en illustrations pour les livres qui, depuis l'imprimerie, ont remplacé les missels; en peinture sur verre; en sculptures grossières sur la surface des constructions ; en mosaïques ; en fresques et en peintures à l'œuf qui, au XIVe siècle, servirent de lien entre l'art religieux, puissant par son imperfection même, et la perfection impuissante qui lui succéda.

De toutes ces diverses branches, les plus importantes sont la marqueterie et les mosaïques du XIIe et du XIIIe siècles, dont celles qui décorent Saint-Marc restent l'expression principale. La peinture des missels ne pouvait pas, par sa minutie, produire une impression grandiose ; elle se bornait fréquemment au simple encadrement des pages, quant aux modernes illustrations des livres, elles ont été si peu remarquables qu'elles méritent à peine d'être citées. La sculpture, quoiqu'elle ait pris une grande importance, a toujours une tendance à se perdre dans l'effet architectural ; elle fut sans doute rarement comprise par la foule, qui déchiffrait encore plus difficilement les traditions reproduites par la pourpre des vitraux. Enfin, la peinture à l'œuf et les fresques étaient souvent limitées et d'un faible coloris. Les grandes mosaïques des XIIIe et XIVe siècles se chargèrent de couvrir d'un réel éclat les murs et les voûtes des églises : on ne pouvait les ignorer ni leur échapper; leur taille les rendait majestueuses ; la distance les faisait mystérieuses ; leur coloris attirait. Rien, dans leur décoration, n'était confus ni inférieur ; aucune trace d'habileté ni de science ne venait détourner