Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/130

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formant un mot connu, il faut que nous voyions pour penser ! » Qu’est-ce que l’éloge d’une vie intérieure ? Qu’est-ce que cette réflexion que l’homme ne profite pas assez de l’expérience des anciens conducteurs de peuples et de la pensée des grands philosophes ? C’est là, pour la plupart d’entre nous, une idée pure ; avec Ruskin, c’est une image, un paysage animé de figures :

Il y a un dessin représentant le cimetière de Kirkby Lonsdale, son ruisseau, sa vallée, ses collines et, au delà, le ciel enveloppé du matin. Et voici que des écoliers, en bande, insoucieux également et de ce paysage et des morts qui l’ont quitté pour d’autres vallées et d’autres deux, ont fait des piles de leurs petits livres sur une tombe pour les démolir à coups de cailloux. Ainsi nous jouons avec les paroles des morts, qui pourraient nous instruire et nous les jetons loin de nous, au gré de notre humeur insouciante et cruelle, ne songeant guère que ces feuilles qu’éparpille le vent furent amoncelées non seulement sur une pierre funéraire, mais bien sur les scellés d’un caveau enchanté… Que dis-je ? sur la porte d’une grande cité de rois endormis. Ils s’éveilleraient pour nous si nous savions seulement les appeler par leurs noms…

Et qu’est-ce que cette vie extérieure, d’ambition et d’ostentation, de bruit d’éloges et de vanités ridicules, que nous cherchons même au prix de notre repos ? C’est encore une image, c’est un tableau brossé de main de maître, où passent des