Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/333

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§ 4.

Enfin, il ne servirait de rien qu’on rendît aux corps humains et vivants leur grâce primitive, si nos âmes n’étaient point préparées à être heureuses de leur bonheur. À quoi bon la beauté des choses, si les êtres ne peuvent la ressentir ? À quoi bon des êtres et des choses admirables, sans des âmes capables d’admiration ? Or, les âmes contemporaines sont-elles capables d’admiration ? Quelques-unes sans doute, et ce sont les mieux partagées ; mais la plupart d’entre nous ne cheminent-ils point parmi les beautés éparses dans la Nature et dans l’Art, comme les gardiens d’un musée, des policemen ou des sergents de ville, se promènent entre des Van Dyck et des Hobbema ? Rien dans notre éducation, dans nos mœurs, dans les préoccupations publiques n’est dirigé dans ce sens. Nous n’avons pour les hauts plaisirs de la vie esthétique ni l’attention suffisante, ni la liberté nécessaire. « Toute la force de l’éducation, jusqu’ici, a été dirigée de toutes les façons possibles vers la destruction de l’amour de la Nature. La seule connaissance qui a été considérée comme essentielle parmi nous est celle des mois, et après celle-là, celle des sciences abstraites, tandis que tout goût montré par les enfants pour la simple histoire naturelle a