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Page:Rutebeuf - Oeuvres complètes, recueillies par Jubinal, tome I, 1839.djvu/176

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LI DIZ DE PUILLE.

Or preneiz à ce garde, li groz et li menu,
Que puis que nos sons nei et au siècle venu,
S’avons-nos pou à vivre ; s’ai-je bien retenu,
Bien avons mains à vivre quant nos sommes chenu.

Conquérons paradix quant le poons conquerre ;
N’atendons mie tant meslée soit la serre.
L’arme at tantost son droit que li cors est en terre :
Quant sentance est donée noians est de plus querre.

Dieux done paradix à touz ces bien voillans :
Qui aidier ne li vuet bien doit estre dolanz.
Trop at contre le Roi d’Yaumons et d’Agoulans[1] :

    qu’on venait de lui donner et livra bataille à Mainfroi, qui fut tué dans le combat. Ceci eut lieu au commencement de janvier 1266.

    Mais peu après, les habitants des Deux-Siciles, irrités du joug que faisait peser sur eux leur nouveau souverain (voyez, pour la justification de cette opinion, la note R à la fin du volume), appelèrent à leur secours le jeune Conradin, neveu de Mainfroi, fils de l’empereur Conrad IV d’Allemagne et d’Élisabeth de Bavière. Ce prince, âgé de quinze ans, accourut en Italie à la tête d’une petite armée, fut vaincu le 23 août 1268 dans les plaines de Tagliacozzo (voyez pour ce combat, à la fin du volume, la note G, sur Érart de Valéry), et fait prisonnier avec son cousin Frédéric d’Autriche, fils d’Herman, marquis de Bade. L’histoire a flétri justement la cruauté de Charles d’Anjou, qui, peu touché de leur position et de leur âge, leur fit trancher la tête à Naples sur un échafaud, le 26 octobre de la même année. Cet assassinat politique ne porta point bonheur à son auteur : il devint odieux à ses sujets, et leur haine contre les Français éclata enfin comme un coup de tonnerre, en 1282. par le massacre des Vêpres siciliennes.

    Charles d’Anjou n’essuya plus dès-lors que des revers, et mourut en 1285. (Voyez, pour plus de détails sur ce prince, la note R, à la fin du volume.)

  1. Le roman d’Agoullant, d’Hyaumont ou d’Aspremont, car il porte ces trois noms, fait partie des romans des douze pairs. La bibliothèque royale en possède deux exemplaires, dont l’un est privé de son commencement. Cette chanson de geste, dont l’auteur est inconnu, s’ouvre par l’arrivée d’un messager envoyé à Charlemagne de la part d’Agoullant, roi d’Aspremont, ville située bien au-delà de la Pouille et de la Calabre, selon le ro-