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Page:Rutebeuf - Oeuvres complètes, recueillies par Jubinal, tome I, 1839.djvu/265

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DE LA VIE DOU MONDE.

Si fil sont endormi ; n’est nul qui por li velle ;
Elle est en grant péril se Diex ne la conselle.

Puisque justice cloce, et drois pent et encline,
Et vérités cancelle, et loiautés décline,
Et carités refroide, et fois faut et défine,
Jou dit qu’il n’a ou monde fondement ne racine[1].

Fause marcheandisse est coverte d’usure,
Et castés est mise arrière par luxure.
Chascuns pense[2] du cors, et de l’âme n’a cure ;
Or sachiés que li mondes est en grant aventure.

Onques mais ne fu[3] tant de grans préchéeors,
Et si ne pert al siècle, trop est de péchéors
Qu’il sont tot esbloï[4] aussi comme li ors
Et fuient en enfer les galos et les cors.

Ains puis ke nostre Sires forma le premier home
Ne puis que nostre père Adans manga la pome,
Ne fu Diex mains doutés desos la loi de Rome :
De Rome vient li max qui les vertus asome[5].

Rome, qui déust estre de nostre loi[6] la fonde,
Symonie, avarice, et tos max i abonde :

  1. Le Ms. 274 bis N-D. ajoute ce vers :
    Fors Dieu croire et amer, c’ot vraie médecine.
  2. Ms. 198 N.-D. Var. Aime.
  3. Ms. 274 bis N.-D. Var. Ne véistes.
  4. Ms. 198 N.-D. Var. Avueglés.
  5. Ms. 7633. Var. De là vient touz li mauz qui les vertus asoume.
  6. Ms. 7633. Var. Foi.