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Page:Rutebeuf - Oeuvres complètes, recueillies par Jubinal, tome I, 1839.djvu/411

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ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

une course qu’ils entreprirent vers Tabarie. Les Hospitaliers, les Allemands et la compagnie des chevaliers de Geoffroy de Sergines furent surtout maltraités, grâce à l’avidité de l’avant-garde, qui, por convoitise du gaaing, estoit bien .iij. liues loing des autres, et qui se fit battre par les Turcs du Saphet embuschiés au Carroublier, près du plain d’Acre. Il paraît qu’il périt dans cette rencontre environ cinq cents hommes, perte immense pour des troupes qui ne pouvaient se recruter que difficilement. Bondocdar fit de nouveau en 1267 éprouver aux chrétiens une défaite semblable.

On conçoit jusqu’à quel point de pareils revers durent mettre en péril les colonies chrétiennes. Aussi Geoffroy de Sergines réclamait-il sans cesse des secours auprès du pape. Le souverain pontife ne trompa pas son espérance : il fit tout ce qu’il put auprès des princes pour les décider à envoyer en Terre-Sainte des hommes ou de l’argent ; mais les temps de ferveur étaient passés : il n’obtint pas beaucoup de succès. Ce n’est cependant point faute d’éloquence et de pathétique, car nous voyons que les vingt lettres de Clément IV, écrites de 1265 à 1268 au cardinal Simon, et qu’a rapportées dom Martenne, présentent les tableaux les plus lugubres de l’état de la Terre-Sainte. Le secours dont les possessions d’outre-mer avaient besoin était, à ce qu’il paraît, si pressant que le pape fit donner lui-même de l’argent à des seigneurs pour faciliter leur passage, entre autres à Odon de Corpelay, auquel il chargea le doyen de Paris de remettre 100 livres tournois. En même temps Clément écrivait à Geoffroy de Sergines, aux maîtres du Temple et de l’Hôpital, pour les encourager à la patience. Dans une de ces lettres il dit que ses oreilles ne sont point sourdes ni ses entrailles de fer pour n’être point touchées de leurs plaintes ; que plusieurs princes dorment encore et dormiront, mais que du moins ils convertissent leur dévotion en quête, et demandent des subsides, qu’il enverra outre-mer, etc., etc.

Enfin le Trésor des chartes nous fournit la reconnaissance suivante de Geoffroy de Sergines pour une somme de 2000 livres dont il avait grand besoin, et qu’il em-