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Page:Sacher-Masoch - A Kolomea - Contes juifs et petits russiens, 1879.djvu/160

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À KOLOMEA.

science se transmet, dans de certaines familles, de père en fils. C’est incontestable. »

M. Antoni se rapprocha vivement d’elle.

« C’est étrange, dit-il. Ainsi, les habitants de ces montagnes, les Houzoules, sont libres depuis longtemps, et courageux. Ils se rapprochent des Écossais de Walter Scott ou des Indiens.

— Oui, et je vous réponds qu’ils n’entendent pas la plaisanterie, répliqua M. Adam. Étendez un de nos paysans sur le banc de pénitence, il vous baisera encore la main. Un Houzoule le prend différemment, lui, je vous prie de le croire. Moquez-vous de lui, il vous fend la tête sans crier gare.

— Il vous fend la tête, reprit l’abbé. Et avec quoi ?

— Avec son topar. C’est une hache à long manche qui lui sert à la fois de canne et de cognée. Chacun d’eux, de plus, possède un fusil. Vous lui causez plus de joie avec une poignée de poudre qu’avec un sac de ducats.

— Que me dites-vous ?

— Ah ! ce sont de rudes et fiers gaillards, fort gais, mais vindicatifs et rusés. Ils n’aiment que leurs rochers. Nous avons un dicton : « Le Houzoule languit dans la plaine. » Somme toute, c’est un peuple inculte. Leurs hommes atteignent souvent leur maturité sans avoir mis le pied dans une église. Comprenez-vous ça ? Une nation sauvage, de vrais Indiens.

— Ha ! ha ! ha ! s’écria le Cosaque, et tous les brigands qui en font partie.

— Les brigands ? répéta le jeune prêtre.

— Qu’avais-je donc à vous citer ?… interrompit le baron brusquement ; oui, oui, croyez-le, c’est un mauvais exemple pour nos paysans. Ils comparent leur as-