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Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/39

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LA FEMME SÉPARÉE

citoyens, de patriotes, et quel agrément trouveraient-elles au métier des armes ? fis-je remarquer non sans une légère ironie. Tenez ! je vous vois d’ici à la tête d’un régiment.

— Oh ! pardon ! Soyez persuadé que je le commanderais peut-être mieux que maint colonel, s’écria Katinka en riant ; mais, plaisanterie à part, c’est justement pendant la guerre que l’énergie et le courage des femmes ont fait le plus souvent leurs preuves. Je ne vous rappellerai pas les femmes de l’antiquité ; je laisserai tranquilles dans leurs tombeaux Sémiramis et Zénobie, Vlasta et la Pucelle d’Orléans ; mais songez aux Françaises de la grande Révolution, aux Espagnoles et aux Tyroliennes de 1809, aux Allemandes de 1813. N’ont-elles pas, ces héroïnes, fait preuve, tout autant et plus que les hommes, de vaillance, de mépris de la mort et de patriotisme ? Rappelez-vous les régiments féminins de l’Amérique du Sud, et, pour ne pas nous éloigner de notre époque, les hordes guerrières du Dahomey, sur la terre desquelles nul homme ne met le pied que comme prisonnier et pour servir la femme qui l’a vaincu sur le champ de bataille. Quand elle en est fatiguée, elle le vend aux blancs, comme esclave. Eh bien ! j’espère qu’une telle perspective vous sourit ?

— Oh ! je suis persuadé que nos femmes ne