Aller au contenu

Page:Sacher-Masoch - La Femme séparée, 1881.djvu/78

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
62
LA FEMME SÉPARÉE

Il se faisait payer horriblement cher, recevait ses clients dans un salon tendu de velours et faisait des scènes à son domestique lorsqu’une vieille galette sèche manquait. C’est ainsi qu’on arrive à la fortune. C’est ainsi qu’Aaron Moscheles devint riche. Dès qu’il put en quelque sorte se retourner, il commença à jouer à la Bourse, de petites sommes pour commencer, puis des grandes ; prêta secrètement sur gages ou sur des valeurs, préleva des intérêts d’un taux inouï, dépouilla les malheureux qui se livraient à lui ; fut cause du suicide de plus d’un honnête homme et plongea des familles entières dans le deuil et dans la désolation. On le haïssait, on le méprisait. À tout moment, le nombre de ses ennemis s’augmentait, comme des champignons après les pluies. Il ne s’en occupait guère. Il devint riche.

Au second de ses projets, maintenant : — une position dans la société. Un titre peut toujours servir d’appât auprès des gens. Ce précepte de son maître occupait surtout ce fidèle disciple de Méphistophélès.

Il lui était impossible de recommencer ses classes et de suivre les cours de la Faculté de médecine, qu’il avait négligés. Il eut une idée hardie, alors : il acquerrait le diplôme de docteur en philosophie. Car, au bout du compte, un diplôme est un diplôme,