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Page:Sacher-Masoch - Le legs de Caïn, 1874.djvu/169

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miroir qui le lui dit, personne autre : Mihaël n’y songe pas. Il pense sans doute que son amour et son dévouement sont des hommages suffisants.

Elle s’habille avec goût. Pour qui encore ? Pour la paysanne qui lui vend des champignons ? Pour le garde-chasse qui apporte les canards tués par son mari ? Pour la nourrice des enfants ? Pour son mari, qui trouve tout cela tout simple ? Ne l’a-t-il pas payée assez cher par le sacrifice de sa fortune et de sa liberté ? Il lui fallait une belle femme et une maison bien tenue. Être belle, c’est son devoir, et une toilette qui la fasse valoir est de rigueur. Lorsqu’elle monte à cheval comme une amazone, qui l’admire ? Ce n’est pas son mari. Il la mépriserait, si elle avait peur ; bien au contraire, il lui conseille la prudence, car elle a des enfants. C’est la situation d’un comédien forcé de jouer devant les banquettes. Parfois elle passe la nuit à pleurer de rage dans son oreiller.

Mihaël un matin aperçoit sur son front un nuage qui ne veut pas se dissiper. ― J’ai trouvé quelque chose, dit-il enfin, pour te distraire. ― Et il lui montra un joli petit fusil qu’il avait fait venir de la ville. ― Tu apprendras à tirer, et tu m’accompagneras à la chasse. Veux-tu ?

Tout fut oublié aussitôt ; Olga sauta au cou de son mari, radieuse, l’embrassa sur ses rudes joues. ― Je veux apprendre tout de suite, aujourd’hui, s’écria-t-elle ; mais tu n’auras pas le temps ?

― J’ai toujours le temps lorsqu’il s’agit de ma