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Page:Sacher-Masoch - Le legs de Caïn, 1874.djvu/218

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MARCELLA
LE CONTE BLEU DU BONHEUR


I

Ce fut dans l’été de 1857 que je revins au pays, après une absence qui avait duré près de dix ans. Mon impatience de revoir la terre natale était devenue peu à peu une maladie, une fièvre, dont je ne fus guéri que lorsque je respirai de nouveau l’air embaumé de thym et d’absinthe de nos villages, que je retrouvai les sarraus de toile et les chapeaux de paille de nos paysans, les caftans noirs et les calottes de nos Juifs. Je doute que jamais dans ma vie j’aie été aussi gai, aussi complètement content, ou que je doive l’être jamais au même degré que pendant ces jours heureux, et c’est dans cette belle disposition d’esprit que le hasard me fit rencontrer dans une auberge du grand chemin le plus cher de mes camarades d’enfance, le comte Alexandre Komarof.