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Page:Sacher-Masoch - Sascha et Saschka (suivi de) La Mère de Dieu, 1886.djvu/118

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LA MÈRE DE DIEU.

dressant ses larges épis dont la teinte dorée rivalisait avec les cheveux des petits enfants du hameau ; le seigle brunissait au soleil, et partout entre les sillons se trouvaient des alouettes prêtes à s’élever dans l’air en chantant.

Sabadil les suivait des yeux lorsqu’elles s’envolaient, mais il devait bientôt ramener son regard à terre, tant le bleu du ciel était pur et éblouissant. Il n’y avait qu’un petit nuage au ciel, un léger flocon blanc et immobile comme un agneau qui se serait égaré de son troupeau et qui n’ose avancer tout seul. L’air était chaud et lourd. Le soleil éclairait la campagne, réchauffant ses teintes vives.

Une source limpide, aux ondes vertes et écumeuses, descendait dans la vallée en sautillant, et près de cette source, au milieu d’un bouquet de bouleaux aux troncs satinés, se trouvait un petit moulin, qui, lui aussi, était en fête ce jour de dimanche. Sa roue séchait aux caresses de la brise. Ses volets étaient fermés. Pas un souffle n’agitait les branches des arbres fruitiers qui l’entouraient baignés de lumière. Tout à coup un rouge-gorge se mit à chanter dans un noisetier. Et comme Sabadil s’arrêtait et tendait l’oreille, absolument ravi, la gentille petite bête sautilla de feuille en feuille et contempla le paysan d’un œil hardi, sans aucune frayeur. Plus loin, un pic frappant des coups sonores sur l’écorce d’un arbre. Ces battements troublaient le silence du dimanche d’une note étrange.

Sabadil avançait toujours. Autour de lui une grande fraîcheur montait. Il se trouvait maintenant