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Page:Sacher-Masoch - Sascha et Saschka (suivi de) La Mère de Dieu, 1886.djvu/227

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LA MÈRE DE DIEU.

Elle souriait d’un sourire plein de grâce et resta parfaitement calme.

« Tu as raison, s’écria Barabasch, qui se précipita dans la chambre comme un possédé, ne fuis pas, Mardona ! Ne sommes-nous pas là pour te protéger ?

— Oui, nous te défendrons ! » crièrent en chœur une foule de Duchobarzen attirés par le tapage.

La chambre, la cour, la route furent en peu de temps envahies par les partisans de la Mère de Dieu.

« Mardona, dit Sabadil d’une voix ferme, aussi longtemps que je vivrai, personne ne portera la main sur toi !

— Je vous remercie, mes amis, dit Mardona avec beaucoup de douceur. Vos intentions sont bonnes. Cependant, je ne puis les approuver. J’agirai selon la volonté de Dieu, et, s’il l’exige, eh bien, je porterai ma croix pour l’amour du Christ. Je vais partir immédiatement pour la ville : je vais me livrer à la justice.

— Tu veux… ? s’écria Barabasch épouvanté.

— Oui, je le veux, interrompit Mardona. Ainsi, trêve de paroles, je vous prie ! Je vais m’habiller tout de suite. Ce juif m’emmènera dans son traîneau.

— Je t’accompagne, dit Sabadil.

— Non ! vous resterez tous ici. »

Mardona s’habilla rapidement et monta dans le traîneau du juif. Personne n’osa la retenir. Ses partisans la suivirent du regard, mornes et consternés. Elle resta calme et digne. Chemin faisant, elle s’entretint avec le juif ; elle le questionna : elle lui demanda le nom du juge, si celui-ci était jeune, s’il était marié. Elle n’oublia pas de lui demander s’il aimait les