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Page:Sacher-Masoch - Sascha et Saschka (suivi de) La Mère de Dieu, 1886.djvu/51

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SASCHA ET SASCHKA.

passèrent sous des influences diverses, comme on vient de le voir. Il avait environ vingt ans lorsqu’il dut se rendre à Lemberg pour y étudier à l’Université. C’était la première fois que l’un des membres de la famille Homutofko n’embrassait pas l’état ecclésiastique. Mais le jeune homme avait de graves raisons pour se vouer à une autre carrière. Sa mère se laissa convaincre par ses motifs, et le curé était satisfait du moment que son fils bien-aimé se destinait au service de l’État.

« Nous sommes un peuple de paysans et de prêtres, disait Saschka quand il parlait à ses parents de sa résolution ; nous ne devons nous en prendre qu’à nous-mêmes des diverses et fâcheuses conséquences qui en résultent. Les nobles et les bourgeois de notre pays sont devenus Polonais pendant la glorieuse époque de la république polonaise. C’est seulement parmi nos campagnards et dans l’Église que se sont conservés nos croyances, notre langue et notre caractère national.

« À l’époque de la domination de la Pologne, un habitant de la Petite-Russie aurait vainement brigué une dignité ou un emploi hors de l’Église ; les marchands et les artisans eux-mêmes étaient forcés de parler la langue des dominateurs s’ils voulaient prospérer. Depuis que l’empereur d’Autriche commande dans notre pays, tout a changé ; personne n’est préféré, personne n’est méprisé ; chaque peuple, chaque croyance a droit au même respect. C’est à nous maintenant de renoncer aux anciennes traditions, qui aujourd’hui ont perdu leur crédit, auxquelles on n’attache plus aucune importance,