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Page:Sade, Bourdin - Correspondance inédite du marquis de Sade, 1929.djvu/261

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MARQUIS DE SADE — 1783
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Si vous doutez de la vérité de l’avis, il sera très aisé de vous en convaincre en envoyant ma lettre à Paris, mais, encore un coup, j’ai droit d’attendre de votre part une réponse ; il me la faut absolument. Rousset.

De la Coste, 4 avril 1783.


La marquise donne à l’avocat des nouvelles de M. de Sade et de ses enfants. « Ce samedi saint au matin. 1783. »

……Le mal d’œil de M. de Sade va tout doucement ; il s’en plaint. L’oculiste dit que cela ne sera rien ; il est certain que toujours lire, écrire et s’impatienter met le feu dans le sang……

Mes enfants se portent bien. L’aîné est plus grand que moi ; cela n’est pas beaucoup dire, mais c’est beaucoup pour son âge. Il se plaignait l’autre jour qu’il ne grandissait plus ; j’ai ri de cette plainte : à seize ans, avoir cinq pieds un pouce, l’on doit avoir de l’espérance. Le chevalier est aussi très grand, mais beaucoup plus gros. Ma fille est fort tardive en tout ; on ne sait encore ce qu’elle sera……


Mademoiselle de Rousset cherche à dominer ses souffrances pour ne pas aggraver son mal. (6 mai 1783).

Je vous remercie de votre attention, monsieur l’avocat, à vous informer de mes nouvelles. Je souffre encore beaucoup de mes crispations de nerfs. Les bains n’ont produit aucun bon effet ; je les ai laissés. Je souffre, non patiemment, car j’ai des moments dépitants, mais je souffre persévéremment avec toute la philosophie nécessaire pour ne pas aggraver mon mal……


La marquise écrit à l’avocat que la foudre est tombée sur le donjon de Vincennes et lui parle des brouillards secs qui ont effrayé les Parisiens.

……Je ne peux voir M. de Sade de quelque temps, attendu les réparations que l’on va faire au donjon où le tonnerre vient de tomber par deux fois. M. de Sade m’a écrit depuis ; il n’y a eu personne de blessé. J’aurais voulu qu’au lieu de faire des trous aux murailles, il fondît toutes les ferrures et clefs.

Nous avons eu ici des brouillards secs[1] qui ont fait peur à bien du monde. Cela n’a fait mal à rien, mais l’on prédisait la fin du monde. Il a fallu faire écrire les astronomes pour rassurer. Ce 11 juillet 1783.

  1. Ces brouillards, qui répandaient une lumière très sensible, même à minuit, se sont reproduits en 1831. Ils ont été attribués à des vapeurs cométaires mêlées à l’air. Mais, bien qu’ils ne s’étendissent pas partout, notamment en mer, l’astre qui les aurait produits n’a jamais été aperçu.