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Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 1, 1795.djvu/193

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monstre qui oserait prétendre à mon Aline ?… lui grand Dieu ?… il faudrait que je n’eûs plus une goutte de sang dans les veines, pour qu’une telle infamie se consommât !… homme vil et barbare, comment as-tu pu fixer mon ange, sans que ton cœur redevint honnête ? comment le libertinage souille-t-il un instant l’individu auquel il a été permi de respirer l’air que mon Aline épure ? Quoi tu l’as vue, et des horreurs empoisonnent ton ame ?… Tu oses aspirer à elle, et tes mains se plongent dans l’infamie ? Il est donc des êtres insensibles sur qui l’amour et la venu n’agissent point… Ah ! je croyais qu’auprès des dieux le crime devenait impossible.

L’état de mon cœur ne se conçoit pas… tour-à-tour livré à la crainte, aux soupçons ; en proie à la plus amère douleur, inquiété par tout ce qui arrive, déchiré par votre absence… il faut que je vous quitte… Je le sens ; mes pensées, mes expressions, tout porterait l’empreinte de ma douleur ; tout se ressentirait de mon