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Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 1, 1795.djvu/32

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Aline à Valcour.

intérêt qu’il consulte, et le sacrifice entier de tous mes sentimens doit être fait à ses caprices. N’accusez point ma mère, il n’y a rien qu’elle n’ait dit, rien qu’elle n’ait fait, rien qu’elle n’imagine encore… Vous savez comme elle aime sa fille, et vous n’ignorez pas non plus les sentimens de tendresse qu’elle éprouve pour vous… Nos larmes se sont mêlées… Le barbare les a vues, et n’en a point été attendri… Ô mon ami ! je crois que l’habitude de juger les autres, rend nécessairement dur et cruel. C’est un parti convenable, madame, a-t-il dit en fureur à ma mère : je ne souffrirai point que ma fille le manque, d’Olbourg est mon ami depuis vingt-cinq ans, et il a cent mille écus de rente ; toutes vos petites considérations peuvent-elles balancer un argument de cette force ? Épouse-t-on par amour aujourd’hui ?… C’est par intérêt, ces seules loix doivent assortir les nœuds de l’hymen ; hé, qu’importe de s’aimer, pourvu qu’on soit riche ! L’amour donne-t-il de la considération dans le monde ? Non, en vérité, madame, c’est la fortune, et l’on ne vit point sans considération. D’ailleurs, qu’a donc mon ami