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Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 1, 1795.djvu/68

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dans les bras de ce chef respectable, et refusant cette dernière offre, par où ai-je pu mériter tant de bontés ?… Quel motif vous engage ainsi à servir l’infortune ?… « Mon cœur, me répondit M. de * * *, il fut toujours l’asyle des malheureux, et toujours l’ami de ceux qui vous ressemblent. »

Vous jugez de ma reconnaissance, Aline, je ne vous la peindrais que faiblement ; j’embrasse les deux fideles amis que mon heureuse étoile vient de me faire rencontrer ; je gagne, au plus vite, le rendez-vous qui m’est indiqué ; j’y trouve mes gens ; je m’élance en larmes dans ma voiture ; je laisse à mon valet-de-chambre le soin de tout ; je lui nomme Genêve, nous volons, et je m’anéantis dans mes pensées.

Vous imaginez, sans doute, aisément combien cette malheureuse affaire, quelque bonne tournure qu’elle prit, nuisait cependant à ma fortune ; il me devenait impossible d’aller prendre connaissance de mon bien, impossible de me rendre à l’expiration de mon congé, plus impossible encore de publier les motifs de ma fuite, de peur de faire éclater