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Page:Sade - Cahiers personnels, Adélaïde de Brunswick, Pauvert, 1966.djvu/328

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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK

— Si vous trahissez, nous périrons ensemble. Songez que je vous associe à ma mort, et vous ne voulez pas que cette idée m’effraie ! Ainsi donc, je n’aurai de vous que de l’amitié pour prix du plus grand sacrifice qu’il soit en mon pouvoir de faire ?

— Vous appréciez bien mal le sentiment que je vous offre, si vous ne le trouvez pas supérieur à l’amour.

— Mais m’y conduira-t-il au moins ?

— Ne me faites pas répéter ce que je vous ai dit… Allons, Antoine, quel est votre serment ?

— De m’aimer du plus tendre amour.

— Ainsi, vous ne voulez rien dire !…

Adélaïde s’échappa cette fois avec le ferme projet de ne plus rentrer dans cette maison.

— Non, non, s’écrie le sénateur en la retenant, vous allez tout savoir ; mais prononcez et signez : « Je jure de ne jamais rien dire de ce qui va m’être confié, d’exécuter tout ce qui me sera prescrit et de faire sans regret le sacrifice de ma vie, si l’on peut jamais me prouver que j’ai trahi ceux auxquels je me lie. »

— Me voilà donc associée au crime, dit Adélaïde un peu troublée, en posant la plume qui vient de tracer le nom qu’elle porte à Venise.

— Non, ce n’est pas le crime que vous avez