Aller au contenu

Page:Sade - Cahiers personnels, Adélaïde de Brunswick, Pauvert, 1966.djvu/368

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
348
ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK

— Et sa conversion ?

— Elle fut parfaite : nous la croyons dans le sein d’un Dieu qui pardonne quand le repentir est sincère.

— Mais si les malheurs nous forcent aux crimes, mon Père, ces crimes, presque nécessités, sont-ils toujours aussi graves aux yeux de l’Éternel ?

— L’homme est toujours coupable de n’avoir pas employé toute la force qu’il reçut de Dieu pour supporter les malheurs qu’il éprouve et qui le portent au crime : car il ne se livre alors à ce dernier excès de l’égarement humain que parce qu’il croit s’affranchir du malheur. Qu’il apprenne à le supporter, et il ne se livrera pas à ce qu’il croit devoir le lui épargner ; qu’il réfléchisse que le nouveau malheur où l’entraînera le crime doit nécessairement être plus affreux que celui dont il cherche à se garantir par le crime même ; et s’il fait bien cette réflexion, le voilà certainement préservé. Tout vient donc de la faiblesse humaine, et cette faiblesse ne dérive que de la tiédeur que nous mettons à nous rendre dignes des grâces de l’Éternel, et surtout à les lui demander.

— Ô mon Père, dit Adélaïde, qui pourrait suivre vos conseils serait à l’abri de bien des maux !

— Qu’il descende dans notre retraite, dit Urbain ; qu’il y vienne et il éprouvera bientôt que