Aller au contenu

Page:Sade - Cahiers personnels, Adélaïde de Brunswick, Pauvert, 1966.djvu/396

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
376
ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK

— Son embarras, sa confusion lorsque je l’interroge sur sa conduite.

— Ah ! mon prince, que ces preuves sont faibles ! Ne savez-vous pas qu’une semblable explication fait toujours rougir une femme ? Quelle est celle dont la modestie n’est pas alarmée par de telles inculpations ? S’il est vrai que vous soyez revenu de vos soupçons sur le jeune Kaunitz, sur qui peuvent-ils donc porter aujourd’hui ?… Souffrez, mon prince, que je vous le dise : vous êtes le seul artisan de vos peines ; vous n’avez que celles que votre imagination enfante ; revenez des erreurs où elle vous entraîne, et vous serez le plus heureux des hommes.

— Je ne suis pas persuadé comme vous, dit le prince, de son innocence avec Kaunitz… Qu’allait-il faire enfin à ce rendez-vous ? Mais, à supposer même qu’Adélaïde n’eût aucun tort ce jour-là, comment excuserez-vous celui qu’elle a eu en enfreignant mes ordres à Torgau, dont elle ne s’échappa que pour aller courir l’Allemagne que pour devenir tour à tour la maîtresse d’un margrave, d’un chef de bandits et d’un conspirateur ?… Peut-elle justifier de cette multitude de torts ? Et quand je l’interroge, pourquoi ne me répond-elle que par le plus coupable embarras ? Non, mon ami, non, jamais vous ne la justifierez.