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Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/142

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les charmes les plus capables de faire ſenſation ; une taille de nymphe, une figure ronde, fraîche, extraordinairement animée, des traits mignons & piquans, la plus jolie bouche poſſible, de très-grands yeux noirs pleins d’ame & de ſentiment, des cheveux châtains tombant au bas de ſa ceinture, la peau d’un éclat… d’une fineſſe incroyable ; déjà la plus belle gorge du monde, d’ailleurs de l’eſprit, de la vivacité, & l’une des plus belles ames qu’eût encore créée la Nature. À l’égard des compagnes avec qui je devais ſervir dans cette maiſon, c’étaient deux payſannes, dont l’une était gouvernante & l’autre cuiſiniere. Celle qui exerçait le premier poſte, pouvait avoir vingt-cinq ans, l’autre en avait dix-huit ou vingt, & toutes les deux extrémement jolies ; ce choix me fit naître quelques ſoupçons ſur l’envie qu’avait Rodin de me garder. Qu’a-t-il beſoin d’une troiſième femme, me diſais-je, & pourquoi les veut-il jolies ? Aſſurément, continuai-je, il y a quelque choſe dans tout cela de peu conforme aux mœurs régulieres dont je ne veux jamais m’écarter ; examinons.

En conſéquence, je priai Monſieur Rodin de me laiſſer prendre des forces encore une ſemaine chez lui, l’aſſurant qu’avant la fin de cette époque il aurait ma réponſe ſur ce qu’il voulait bien me propoſer.

Je profitai de cet intervalle pour me lier plus étroitement avec Roſalie, déterminée à ne me fixer